Fermetures d’usines, délocalisations… Pas un jour ne passe sans que l’actualité économique ne fasse ressurgir le spectre de la désindustrialisation en France. Pour enrayer le phénomène et redynamiser le secteur, l’écosystème industriel français a tout intérêt à prendre le virage de l’industrie du futur, à condition d’y associer une montée en compétences des collaborateurs de l’usine.
Industrie : une montée en compétences nécessaire
L’industrie du futur se caractérise notamment par le déploiement des technologies numériques au coeur des processus de production des usines. Présentée comme la quatrième révolution industrielle, la " smart factory " est devenue l’une des priorités de la politique industrielle hexagonale. Et pour cause. L’industrie du futur constitue, à bien des égards, une opportunité pour l’industrie française. A travers l’automatisation des process, la modernisation de l’outil de production et le développement de technologies de pointe telles que de l’IA, l’internet des objets (IoT), la réalité augmentée ou encore l’impression 3D, l’usine du futur accroît sa productivité tout en réduisant ses coûts de production. En se reposant sur l’IA et la data, la maintenance prédictive permet, en effet, d’analyser l’état de fonctionnement d’une machine dans son environnement.
Ainsi, les industriels peuvent anticiper la panne d’un appareil, procéder à des opérations de maintenance et y remédier avant même que la panne ne survienne. L’impression 3D, quant à elle, permet déjà aux constructeurs automobiles à l’image de Bugatti de fabriquer en un temps record et à moindre coût des pièces détachées destinées à leurs voitures. " L’interconnexion en temps réel des différents éléments de l’usine (collaborateurs, produits et machines) entraînera, de fait, une plus grande flexibilité du système productif et davantage de réactivité vis-à-vis de la demande des clients. Grâce à l’industrie du futur, les consommateurs pourront accéder à des produits individualisés au même coût que des produits issus de la production de masse. La finalité de l’industrie 4.0 consiste à mettre à l’envers le paradigme fordiste. " explique Jean-Daniel Weisz, associé chez Kohler C&C, cabinet de consulting et coaching stratégique.
Toutefois, l’avènement de cette industrie du futur fait émerger de nouvelles problématiques liées à la formation et au recrutement des collaborateurs. Selon une récente étude publiée par le cabinet Mazars, le développement des compétences représente la deuxième source de préoccupation des entreprises lorsqu’il est question d'industrie du futur.
Et pour cause. Le défi est de taille pour le tissu industriel français : développer les compétences de leurs collaborateurs tout en attirant de nouveaux talents. Dans un rapport intitulé " Automatisation, numérisation et emploi ", le Conseil d’orientation pour l’emploi (COE) a identifié trois catégories de compétences essentielles aux collaborateurs de l’usine pour faire face aux enjeux technologiques portés par l’industrie du futur : tout d’abord, l’acquisition de nouvelles compétences techniques permettra aux ouvriers d’assurer leurs missions en cas de montée en complexité des tâches qu’ils seront amenées à réaliser, l’acquisition de compétences numériques et cognitives tel qu’il est décrit dans le rapport permettra aux professionnels de l’usine d’exercer leurs activitéś dans un environnement numérisé, tout en faisant preuve d’esprit critique quant aux enjeux d’éthique ou encore de confidentialité.
Pour finir, la COE met en avant la nécessité pour les collaborateurs d’acquérir de nouvelles compétences sociales et situationnelles étroitement liées aux bouleversements que le numérique introduit dans les rapports humains (travail en équipe, autonomie, etc. )
Repenser les formations pour mieux préparer les métiers de demain
En réalité, les besoins en compétences de l’industrie 4.0 exacerbent les difficultés de recrutement déjà existantes dans l’industrie française traditionnelle, notamment lorsqu’il est question de métiers " en tension ". En cause, un secteur industriel peu attractif, qui souffre d’une représentation souvent erronée de la part des jeunes (image réductrice de l’ouvrier, conditions de travail jugées trop difficiles, salaires bas…) et des filières de formation initiales qui peinent à répondre aux besoins de recrutement du tissu industriel français.
Pour répondre à ces problématiques, de nombreuses initiatives publiques visant à promouvoir les métiers industriels voient le jour à l’image de la Semaine de l’Industrie dont la 10ème édition devait se tenir le 30 mars prochain à Paris. Les grands acteurs privés se mobilisent également lorsqu’il est question de promouvoir les métiers industriels. Le projet Industreet, porté par le groupe énergétique Total, en est un exemple.
A travers sa fondation d’entreprise, l’entreprise française envisage de créer à horizon fin 2020 un campus dédié aux métiers de l’industrie du futur. Entièrement gratuit, ce centre proposera à 400 jeunes par an non qualifiés des formations tournées vers les technologies les plus innovantes du secteur allant de la numérisation des installations industrielles en passant par la maintenance des terminaux de distribution dans les usines. " Nous voulions, à travers le campus l’Industreet, répondre aux besoins précis des industriels en matière de recrutement : quelles sont les compétences techniques recherchées ? Quels sont les métiers en tension ? Quels soft-skills ? En partant de ce postulat, nous développons une pédagogie alliant technique et savoir-être qui permettra aux jeunes, à l’issue de leurs cursus, de trouver un emploi, de poursuivre leurs études ou de se lancer dans l’entrepreneuriat " explique Abdul Qadir Malik, responsable du projet l’Industreet, campus de l'Industrie du Futur, chez Total.
L’émergence de campus dédiés aux métiers de l’industrie permet d'accroître la porosité́ entre les milieux de l’enseignement et de l’entreprise afin d’anticiper au mieux l’évolution des métiers du secteur industriel français. Une première démarche révélatrice du tournant qu’est en train de vivre le monde de l’industrie française, tant d’un point vu technologique qu’humain.
Maddyness, partenaire média de Total