Outscale, fournisseur de services de cloud (informatique dématérialisée) habilité notamment pour les opérateurs d'importance vitale (OIV), va passer à 100% en télétravail à partir de lundi, a indiqué à l'AFP David Chassan, directeur de la communication. Outscale doit pouvoir continuer à fonctionner en cas de pandémie, et le télétravail est un moyen d'essayer d'étaler au maximum les cas de maladie dans l'entreprise, a-t-il expliqué.
"S'il y a une pandémie, fatalement des collaborateurs seront touchés. Il faut éviter qu'ils le soient tous en même temps", explique-t-il.
Les préparatifs peuvent également concerner les infrastructures. Chez le petit Framasoft, une structure associative française qui se bat pour offrir des services numériques conformes aux rêves des fondateurs - architecture décentralisée, logiciels libres...-, le service de vidéo-conférence Framatalk est passé de "2.000 conférences par jour à 16.000 en 48 heures", selon Pouhiou Noénaute, un chargé de communication de l'association. Celle-ci a dû trouver un serveur plus puissant pour faire fonctionner son service, a-t-il indiqué, confirmant une information du site spécialisé Next INpact.
Il y a également une "augmentation de la fréquence d'utilisation de Framapad", l'outil collaboratif d'écriture de texte de Framasoft, précise-t-il, en notant également que le service d'assistance de Framasoft reçoit désormais régulièrement des demandes d'aide en italien, un phénomène autrefois marginal.
Telehouse, un opérateur de centres de données qui abrite notamment de grandes plateformes d'interconnexion entre grands réseaux (peering), a noté un effort pour "renforcer la tuyauterie centrale" d'internet face à la crise du coronavirus, explique Sami Slim, directeur adjoint de Telehouse en France. Les grandes entreprises du numérique (opérateurs télécoms et grands diffuseurs de contenus en streaming par exemple) renforcent leurs liens directs à l'intérieur des centres de données de Telehouse, sans passer par les grandes plateformes d'interconnection, explique-t-il.
Et sur ces grandes plateformes d'interconnection elles mêmes, le trafic a connu récemment des pics historiques, comme si les grands acteurs du numérique testaient la montée en puissance de leurs services dans les semaines à venir. "Sur la plateforme DEC-IX de Francfort, on a observé un pic historique à 9 terabits par seconde, contre 5 terabits en moyenne", du jamais vu auparavant, indique-t-il.
Plus en amont de la chaîne, les fournisseurs de services de téléconférence, télétravail, ou travail collaboratif se préparent eux-aussi à une montée en charge. Klaxoon, l'entreprise rennaise qui a percé avec ses outils de réunion en ligne, a reçu la semaine dernière "5.000 demandes d'équipes qui voulaient s'équiper des outils de travail Klaxoon, 3 fois plus qu'à l'accoutumée", a affirmé son porte-parole Benjamin Sasu.
Constat voisin chez Oodrive, qui propose des outils informatiques de travail collaboratif sécurisés et bénéficie d'un agrément pour travailler avec les opérateurs d'importance vitale (OIV).
Conseils d'administration à distance
"On voit beaucoup de demandes" de renseignement sur le déploiement de nos outils, indique Stéphane Ankaoua, directeur général en charge des opérations. "Beaucoup de gens commencent à s'organiser pour tenir à distance tout ou partie" des comités exécutifs ou conseils d'administration de la fin du premier trimestre 2020, avec des outils qui permettent aux participants à la fois de communiquer verbalement et d'annoter ou d'échanger des documents, voire de les signer électroniquement. "On commence à avoir une vraie tendance sur le marché et ce qui est intéressant, c'est que cela ne touche pas que les grosses entreprises", a-t-il indiqué.
La crise du coronavirus "va faire prendre conscience aux entreprises qu'il y a des solutions" pour "faire des choses intéressantes" en matière de télétravail, commente Fabio Costa, expert cybersécurité chez Akamai, un géant d'internet qui aide à faire lien entre serveurs et utilisateurs. "Les changements de culture et de pensée passent souvent" par des crises comme celle du coronavirus" qui font comprendre qu'il faut changer, souligne-t-il.