“C’était un rêve fou…” écrivait ce matin Céline Lazorthes, fondatrice et dirigeante de Leetchi, dans un post Facebook annonçant le lancement du Parental Act. Et pour cause, en moins de 3 semaines, l’entrepreneure a réussi, avec Thibault Lanthier, fondateur de Mon Docteur et Isabelle Rabier, fondatrice de Jolimoi, à convaincre plus d’une centaine de dirigeants d’entreprise de signer une charte les engageant à élargir le droit au congé dédié au second parent à la naissance d'un enfant.
Une problématique sur laquelle planche le gouvernement depuis le début des années 2000, sans avoir trouvé de solution probante, mais également au coeur de toutes les entreprises : “les dirigeants ne savent pas forcément quelles dispositions prendre, comment franchir le pas”, précise Thibault Lanthier.
Le droit d’accueillir son enfant
Pour favoriser l’engagement des deux parents, le Parental Act offre ainsi la possibilité “au deuxième parent, indépendamment de son sexe et de la situation maritale de prendre un mois de congé contre 11 jours actuellement pour les pères” explique Thibault Lanthier. Durant cette période, le salarié conservera sa rémunération contrairement à la situation actuelle où il ne perçoit qu’une simple compensation de la sécurité sociale.
Par cette charte, les équipes dirigeantes des 105 entreprises signataires s’engagent également à promouvoir ce congé pour qu’il ne tombe pas dans l’oubli et ne devienne pas qu’une opération de communication. “C’est important d’insuffler une nouvelle culture d’entreprise et c’est pour ça que nous passons d’abord par les jeunes dirigeants” souligne Thibault Lanthier. Plusieurs grands groupes ont également, eux aussi, témoigné leur intérêt pour cette charte mais "leurs process de décision ne rentraient pas dans notre timing”.
Parmi les signataires de la charte : BlaBlaCar, Alan, Talentsoft, Qonto, Happytal, Agricool ou encore Shine, qui avait déjà annoncé en novembre dernier octroyer un congé “second parent” de 5 semaines à ses salariés, y compris pour les couples lesbiens.
Un enjeu social et sociétal
En France la prise d’un congé parental permet de suspendre son activité salariale ou de la réduire à un temps partiel. Durant cette période, le salarié n’est pas rémunéré par son employeur et bénéficie seulement d’une compensation financière, nommée PrePaRe variant entre 148 et 397 euros par mois, bien loin d’un simple SMIC.
Prendre un congé parental revient donc à subir une perte de salaire significative. Dans 97% des cas, il est pris par des femmes en raison de leur rémunération, souvent plus faible que celle de leur conjoint.e et du prix exorbitant d’une nourrice. Résultat, elles restent souvent bloquées dans leur carrière à partir de ce moment là. “Avec ce pacte, nous souhaitons que les femmes aient accès à tous les postes et toutes les responsabilités dans l’entreprise, et que l’équilibre vie professionnelle, vie personnelle soit le même pour tou.te.s” indique Céline Lazorthes.
Proposer une solution alternative qui pousse le deuxième parent à prendre du temps pour son enfant est donc un véritable engagement pour promouvoir l’égalité homme-femme et surtout éviter de faire peser toute la charge mentale sur la mère.
Un mouvement de masse...auquel la France peine à prendre part
Tandis qu’au Danemark, 32 des 52 semaines de congés parentaux peuvent être partagées entre les deux parents et que l’Espagne vient d’allonger le congé paternité à 8 semaines, la France reste murée dans une législation aux effets limitées.
Depuis son instauration en 2002, le congé parental a connu une timide évolution mais pas de grande révolution. En 2014, le gouvernement l’a fait passer de 6 mois à un an à condition que le père en prenne un pour le premier enfant. Pour les autres grossesses, il reste limité à 36 mois dont 24 mois par parent maximum.
Selon une étude de menée par l’OCDE, les hommes ne représentaient que 4% des parents utilisant le congé parental en 2016. Aujourd’hui, ce taux a péniblement évolué à 6%, rien de réellement significatif. Pour autant, cela ne signifie pas que les hommes n’ont pas envie de s’en emparer. “7 pères sur 10 prennent déjà les 11 jours qui leur sont octroyés” explique Céline Lazorthes dans une tribune aux Echos.
Rien qu’aujourd’hui, l’équipe du Parental Act a reçu 20 nouvelle signatures. Un premier pas que les fondateurs espèrent bien faire grandir dans les mois à venir même si aucun objectif chiffré n’est acté.