Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités. Les chefs d’entreprises en ont, et de nombreuses. Notamment vis-à-vis des investisseurs qui ont contribué à faire grandir leur société. Dans cette situation, certains comportements s’imposent.
La nécessité du leadership
Le premier de ces comportements attendus, c’est l’affirmation d’un leadership assumé, voire ostensiblement exprimé. Pierre-Edouard Berion, est particulièrement attentif à ce point : " Je serais paniqué que le CEO de l’entreprise ne soit pas capable de cadrer son board. Il faut un boss, une vision, et le board est là en support, pour aider, échanger. Il y a des entrepreneurs plus scolaires que d’autres, qui font les bons élèves, sont plus dans l’attente d’une approbation, d’autres plus matures, qui prennent les choses naturellement en main, mais il ne doit y avoir personne qui attende qu’on gère son entreprise à sa place. "
Même son de cloche de la part de Stéphane Pesqué : " Dans une entreprise, il y a un.e président.e qui doit cadrer l’ordre du jour, les débats, même si tout le monde peut faire entendre sa voix. Il doit imposer son leadership, dès le premier jour. Il ou elle fixe le tempo, le timing. On espère toujours que ce qu’il ou elle a montré durant nos rendez-vous se prolonge au sein du board. "
" On apprécie que l’entrepreneur·e sache s’entourer de personnes clés de l’entreprise, mais on investit avant tout sur la tête d’un·e entrepreneur·e, sa capacité à transformer son entreprise en quelque chose de plus grand. Ça commence par le leadership. "
Une communication simple et transparente
Seconde attente forte de la part des investisseurs : une communication sans faille de la part de l’entrepreneur·e. Comme le précise Pierre-Edouard Berion, " quand on arrive dans une société, la gouvernance en est modifiée. Car le VC aussi a des comptes à rendre. De fait, cela structure un peu la communication de l’entreprise, dont on attend des indicateurs clés, qui sont par ailleurs les mêmes qu’elle doit suivre ".
Ces indicateurs font partie du fameux board pack que les investisseurs attendent avant toute réunion. " On aime le recevoir quelques jours en amont ", précise Pierre-Edouard Berion. Que doit-il contenir ? " 20 slides environ, avec les KPIs et les sujets importants. Il faut adopter le juste ton entre la synthèse et l’analyse, ne pas entrer dans des data trop fines. "
" Disposer de ce document en amont, des éléments financiers, cela permet de se concentrer sur l’avenir, les prises de décision, la stratégie, les plans d’actions. On ne s’y arrête que si problème il y a ", ajoute Stéphane Pesqué.
" Le board, c’est le thermomètre de la gestion de l’entreprise. Si les choses sont bien traitées en amont, si la réunion est bien préparée, alors c’est productif ".
Des documents qui doivent être les plus transparents possibles. Car s’il y a une chose que les investisseurs détestent, c’est un·e entrepreneur·e qui cache les difficultés. " Un board n’aime pas être surpris par les mauvaises nouvelles. On accepte de travailler pour améliorer les choses, mais on ne veut pas de surprise. Mieux vaut parler des problèmes trop tôt que trop tard. ", indique ainsi Pierre-Edouard Berion. " Il ne faut surtout pas raisonner en se disant qu’au moindre problème, l’investisseur va vous abandonner. Il est là pour aider, mais ne peut pas le faire si les difficultés sont révélées trop tardivement. ", ajoute Stéphane Pesqué. " Ne rien faire n’est jamais une bonne idée. On peut proposer des solutions face à un problème, tout en restant à notre place. On n’est pas là pour gérer l’entreprise. "
Pour ce dernier, tout cela se résume à un mot : " Confiance. Il n’y a pas de création de valeur sans confiance, sans transparence, sans écoute. Les meilleures opérations impliquent une véritable relation de partenariat ". D’autres conseils autour de la gestion du board ? " Je recommande un rythme régulier, mensuel à bi-mensuel, particulièrement pour les jeunes entreprises. ", indique Pierre-Edouard Berion.
" Et penser à limiter le nombre de personnes présentes en réunion pour éviter la cacophonie des égos, le fait de passer plus de temps à débattre et s’écouter parler plutôt que de prendre des décisions. "
Le " off ", un passage obligé
Des décisions qui, toutefois, et de l’aveu de nos deux interlocuteurs, se prennent plutôt en dehors des boards. " Oui les décisions se font souvent dans les couloirs ", concède Pierre-Edouard Berion. " Les boards sont parfois trop rigides. C’est pour cela qu’il est important de créer une relation avec les boards members en dehors du board. "
Même esprit chez Stéphane Pesqué, qui apprécie " le café avant le board, et le coup de fil trois ou quautre jours après. Cela crée une vraie proximité qui facilite le soutien de l’investisseur à l’entrepreneur·e. "
Romain Dehaussy est associé chez Cambon Partners