Il est parfois reproché aux entreprises de se consacrer plus aux choses qu’aux personnes, plus à l’innovation qu’à l’embellissement du quotidien. Pourtant, toute l’année, nous voyons défiler sur Maddyness des projets, des applications, des objets connectés, des initiatives, des plateformes, parfois même des lois, dont le but est d’aider, de protéger, de mettre en valeur, de recycler. Tour d’horizon.
L’introspection verte des entreprises
“Trop cher”, “trop compliqué”, “trop lourd en logistique”, “pas le temps”... Les excuses sont nombreuses lorsqu’il s’agit de se penser sur l’éco-responsabilité de son entreprise. The Galion Project a donc sorti en novembre “Impact Solutions”, un guide de 40 solutions pour optimiser l’impact économique, sociétal et environnemental de son entreprise.
Vie quotidienne, impact environnemental et social du numérique, gouvernance et partage de la valeur, politique RH et philanthropie d’entreprise sont les grands axes de ce plan d’action. Le guide liste même des prestataires éventuels à qui faire appel pour mettre en oeuvre les solutions.
On en a aussi beaucoup entendu parler cette année : le Green Friday, alternative éco-responsable au Black Friday. Au-delà des critiques parfois simplistes et du bon argument marketing pour certaines entreprises, cela peut aussi être un temps de réflexion sur les pratiques de sa propre structure. Les salarié·e·s de Selency sont par exemple allés ramasser des déchets dans la forêt de Rambouillet, dans les Yvelines, et ont eu un atelier de sensibilisation sur les actions vertes du quotidien.
Si la navette parlementaire n’est pas tout à fait terminée, le Parlement a échangé cette année sur la loi anti-gaspillage. Le 13 décembre, l’Assemblée a notamment adopté un amendement sur l’interdiction de détruire des invendus non alimentaires. A partir de 2022, ils devront être donnés ou recyclés et pour certains produits de première nécessité, le don sera obligatoire.
Ce projet de loi, qui couvre aussi la réduction du plastique ou les indices de réparabilité ou de durabilité, vient inscrire dans la loi des pratiques déjà portées par plusieurs entreprises. On peut citer l’indice de durabilité de MaGarantie5ans.fr, la plateforme de ToyRescue centralisant des pièces 3D de jouets populaires pour favoriser leur réparation ou le lancement en région parisienne de Loop, qui permet l’achat en vrac de plusieurs dizaines de marques grâce aux consignes.
Une légère amélioration des conditions de travail des livreurs et VTC
L’année 2019 a aussi fait un (petit) pas vers une meilleure protection des travailleurs·euses indépendant·e·s des plateformes (de livraison notamment). La loi d’orientation sur les mobilités (LOM), votée le 19 novembre dernier, oblige par exemple les plateformes employant VTC et/ou coursiers à mettre en place des mesures comme le droit à la déconnexion, la transparence du prix des courses (notamment la possibilité de le connaître à l’avance) et le droit à la formation.
Le texte a cependant été jugé insuffisant par plusieurs syndicats, qui s’inquiètent que cela fasse échouer les procédures juridiques en cours de livreurs souhaitant être requalifiés en salariés. Le conseil des prud’hommes de Paris a par exemple reconnu ce statut à deux anciens livreurs de l’entreprise belge Take it easy en mars dernier, ouvrant la voie à des indemnités de licenciement à la suite de la fermeture de la plateforme en 2016. Six autres livreurs avaient été eux aussi reconnus comme salariés de la même entreprise par les prud’hommes de Nice en janvier.
Dans la foulée de ces décisions de justice et évolutions de la loi, Deliveroo a annoncé doter ses travailleurs·euses indépendant·e·s d’une couverture maladie jusqu’à 30 euros par jour. L’entreprise a aussi décidé que ses livreurs·euses auraient des représentant·e·s. Là aussi, certains syndicats craignent que ces chartes internes aux entreprises ne leur évitent de requalifier leurs coursiers en salarié·e·s.
Pour un numérique plus inclusif
Même lorsqu’elles salariées, la protection sociale et les évolutions de carrière des femmes ne sont toujours pas optimales. Cinq ans après l’arrivée d’un enfant, le revenu moyen d’une femme se voit diminué d’environ 20%. C’est souvent la mère qui encaisse le coût social et professionnel de la vie de famille, et ce n’est pas qu’une question de volonté du deuxième parent : le “congé de paternité et d’accueil de l’enfant” est de 11 jours dans la loi française, plus trois jours de congé de naissance.
La startup française Shine a donc décidé de mettre en place un congé “second parent” de cinq semaines pour ses salarié·e·s. Il ne concerne pas que les pères, mais aussi les mères dont la conjointe vient de donner naissance ou d’adopter.
Les femmes ne récoltent encore aujourd’hui que 5% de l’investissement en capital-risque en France. Un chiffre qui découle logiquement d’une autre réalité : elles ne sont qu’entre 9 et 12,4% des dirigeant·e·s de startups. Les équipes d’investissement, elles, sont à 90% masculines.
Le collectif Sista, fondée par des actrices clés de l’écosystème entrepreneurial, a présenté fin octobre avec le Conseil national du Numérique une charte pour féminiser plus encore les fonds d’investissement et améliorer le financement des startups portées par des femmes.
Le tout avec des objectifs chiffrés : 25% de startups financées en 2025 fondées ou co-fondées par des femmes, 30% en 2030, 50% en 2050. Cinquante-six structures ont signé la charte et se sont engagées à examiner le dealflow et mesurer la place du genre dans leur portefeuille, adopter des pratiques de recrutement plus inclusives, adopter des pratiques d’investissement plus inclusives et faire rayonner les bonnes pratiques dans l’écosystème.
Dans le même esprit, la plateforme Own Your Cash a lancé au mois de décembre le mouvement #EllesComptent, afin de renforcer le financement des projets fondés ou cofondés par des femmes en s’adressant aux consommateurs et consommatrices prêt·e·s à investir. Une page dédiée sur le site d’Own Your Cash recense les entreprises proposant des produits et des services innovants ou à impact social/environnemental, toutes cofondées par des femmes.
En février dernier, l’ex-secrétaire d’Etat au Numérique Mounir Mahjoubi a annoncé la création du French Tech Tremplin, doté de 15 millions d’euros pour repérer et aider des entrepreneurs de la tech aux profils un peu plus atypiques : personnes en reconversion, habitant·e·s de banlieue, femmes, etc.
La variété des regards dans l’écosystème entrepreneurial découle aussi de réalités sociales et géographiques. L’Aide pour le droit à l’initiative économique (Adie) accompagne depuis 1989 les entrepreneur·e·s en zone rurale. Elle a lancé en novembre une campagne de crowfunding afin de mettre en lumière plusieurs de ces aventurier·e·s de la création d’entreprises au travers d’un documentaire. Le premier seuil de 8000 euros ayant été atteint, on attend le résultat avec impatience.
Le projet de loi sur la haine en ligne toujours en débat
La diversité dans le numérique passe aussi par les voix que l’on laisse s’y exprimer. La députée La République en marche Laetitia Avia porte depuis l’été un texte afin de limiter les messages haineux en ligne, pourtant vivement critiqué en raison de craintes pour la liberté d’expression. Le Sénat a ainsi rejeté mi-décembre deux mesures, dont la principale : l’obligation pour les réseaux sociaux de supprimer un contenu haineux en 24h. L’obligation d’empêcher la résurgence de contenus jugés illicites a aussi été supprimées.
Avec cette loi, le CSA verra son rôle accru. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel pourra faire tomber dans le champ de la loi des plateformes en-deçà du seuil minimal d’utilisateurs (qui pourrait être deux millions) mais dont il juge “le rôle significatif dans la diffusion en ligne des propos haineux”. La Commission européenne, l’Autorité de régulation des télécoms et le Conseil national du Numérique ont aussi émis des réserves sur le texte.