Au-delà de la contrainte règlementaire, certaines startups ont décidé de voir dans l'obligation de la création d'un Comité Social et Economique, une opportunité d'impliquer les salariés dans la vie de l'entreprise et de structurer les actions de bien-être au travail.
Le CSE, kesako ?
A la manière des super saiyan, les ordonnances Macron, fusionnent toutes les instances de représentation du personnel (IRP) : le délégué du personnel (DP), le comité d'entreprise (CE) et le comité hygiène, santé et conditions de travail (CHSCT), en une même super entité : le CSE. L'objectif est de rendre tout ça beaucoup plus simple et beaucoup plus clair.
Cette nouvelle entité, composée de salarié·e·s élu·e·s par les salarié·e·s de l'entreprise, hérite de trois missions :
- représenter le personnel dans les discussions avec la direction
- veiller au respect des conditions d'hygiène, de santé et de travail dans l'entreprise
- faciliter l'accès des salariés à la culture, aux sports, aux loisirs et aux vacances
Petit aparté historique : cette dernière mission remonte aux origines même du comité d'entreprise en 1941 puis en 1946. La situation n'étant pas toute rose pour les français à l'époque, les politiques décidèrent de pousser les entreprises à donner un coup de pouce aux salariés en leur finançant l'accès aux loisirs et à la culture.
Cette vocation perdure avec le CSE, au point que dans les entreprises de plus de 50 salariés, le CSE se voit automatiquement attribuer non pas un, mais deux budgets par l'entreprise :
- un budget de fonctionnement égal à 0,2% de la masse salariale (chargée), pour les dépenses courantes liées au fonctionnement du CSE : déplacements, comptable, juriste etc.
- un budget d'activités sociales et culturelles (ASC), négocié entre le CSE et la direction, pour financer des avantages aux salariés : remboursement d'abonnement à des plateformes de streaming, places de cinéma subventionnées, vacances etc.
Qui est concerné par le CSE ?
Les ordonnances rendent le CSE obligatoire pour toutes les entreprises qui ont atteint le seuil fatidique des 11 salariés sur 12 mois consécutifs. Bien que simple en apparence, le nombre de salariés ne se calcule pas si facilement car CDI, CDD et temps partiels ne sont pas comptabilisés de la même façon. Pas de panique, de nombreuses ressources et juristes sont là pour vous guider.
Historiquement la France compte environ 40 000 CE. Avec ce changement de réglementation, c'est environ 150 000 entreprises qui sont dorénavant concernées, soit plus de 13 millions de salariés français... De quoi donner le tournis.
Par ailleurs plus l'entreprise compte de salariés, plus il y aura de membres élus au CSE. A titre d'exemple, une entreprise de 20 salariés élira 2 membres alors qu'une entreprise de 75 salariés en élira 10.
Le dédale des élections du CSE
Le CSE étant une instance représentative du personnel, les élections pour le mettre en place suivent des règles strictes édictées par le code du travail. L'inspection du travail ne rigole d'ailleurs pas avec ces élections, mal les mener peut coûter très cher à l'entreprise et aux dirigeants : délit d'entrave, prud'hommes etc. Pas besoin de paniquer pour autant. Avec quelques bons articles, un accompagnement de qualité et un peu d'huile de coude on s'en sort très bien.
Les élections du CSE suivent un calendrier chronométré : vous avez exactement 90 jours pour les mener une fois que vous avez informé les salariés de la tenue des élections. Mon conseil : fixez une date du scrutin qui vous arrange et construisez votre calendrier en retroplanning.
Les différentes étapes que vous devez prévoir incluent notamment :
- l'invitation des organisations syndicales à négocier le protocol électoral - OBLIGATOIRE
- l'affichage des listes électorales
- l'ouverture et fermeture des candidatures
- l'annonce des résultats
Attention : vous êtes dans l'obligation d'inviter les organisations syndicales à participer à vos élections. Le premier tour du scrutin leur est d'ailleurs exclusivement réservé. Toutefois, il est rare qu'elles se manifestent pour des élections du personnel en startup.
Le CSE, et si c'était une opportunité ?
Compte tenu de ce qui est écrit plus haut, il est légitime de voir dans le CSE un poids en plus posé par l'administration française sur les épaules des petites entreprises. Cependant de plus en plus de startups ont décidé d'y voir une opportunité d'impliquer des salariés dans la vie de l'entreprise. La logique est simple : quitte à mener ces élections et à attribuer un budget au CSE autant que ce soit bénéfique aux salariés et à l'entreprise.
Il y a 3 aspects clés sur lesquels le CSE peut apporter une forte valeur aux startups :
- Impliquer les salariés dans les sujets structurants : à l'heure où les entreprises se libèrent et les structures organisationnelles se délient, sacraliser un temps de parole (les réunions du CSE) avec des salariés autour de sujets de stratégie, de croissance et de culture, peut être très riche en enseignements.
- Renforcer la culture d'entreprise : en général garantir la culture de l'entreprise est une tâche qui incombe aux fondateurs. Le CSE est l'occasion de constituer une task force de salariés qui œuvrera aux côtés des fondateurs pour défendre et renforcer la culture de l'entreprise, au travers d'événements internes, de communication etc.
- Accroître le bien-être salarié : le budget d'ASC attribué au CSE est l'occasion de structurer la politique d'avantages salariés de l'entreprise, d'autant plus que le CSE bénéficie d'un régime URSSAF très souple : les avantages attribués sont exonérés de charges et non-imposables. La politique d'avantages mise en place servira à la fois à l'attractivité et à la rétention des talents au sein de l'entreprise.
Vous l'aurez compris, derrière le tableau idyllique que je dépeins dans cette dernière partie, se cache une condition sine qua non : les dirigeants doivent croire à l'opportunité que représente le CSE et pousser les salariés à se présenter et à s'impliquer dans la vie de l'entreprise.
Arthur Reboul est CEO de Leeto