L’intérêt des acheteurs publics pour l’acquisition de biens et services innovants est en plein essor et la tendance devrait s’accentuer dans les années à venir. Que l’on songe par exemple aux enjeux du développement durable, à l’aménagement urbain (" smart city "), ou encore aux développements de technologies favorisant l’exercice de la démocratie participative, les personnes publiques sont friandes d’innovations, et l’intégration des nouvelles technologies au sein des services publics constitue à l’évidence le défi de demain.
Afin de favoriser l’innovation tout en cherchant à moderniser le fonctionnement des services publics, le législateur a décidé d’ouvrir la commande publique aux startups et entreprises innovantes, pour une période expérimentale de trois ans, par décret n°2018-1225.
Concrètement, le nouveau dispositif permet aux entreprises proposant des produits et services " innovants " (au sens du Manuel d’Oslo de l'OCDE) de proposer ces produits et services aux acheteurs publics (États, collectivités, hôpitaux et autres établissements publics, etc.) sans passer par la case appel d’offres, leur conférant ainsi un avantage économique et compétitif majeur. Le dispositif est à l’essai depuis le 26 décembre 2018 et restera en vigueur, à titre expérimental, jusqu’au 26 décembre 2021, sauf éventuelle prorogation.
Plus d'appel d'offres pour les contrats de moins de 100 000 euros HT
Pour mesurer l’intérêt du dispositif, il faut rappeler qu’un acheteur public désirant acquérir un bien ou un service, est en principe contraint d'organiser une procédure de publicité et de mise en concurrence, dès lors que son achat est d'une valeur supérieure à 25.000 euros HT. En dessous de ce seuil, l'acheteur public est libre de contracter directement avec l'opérateur de son choix. Avec ce dispositif expérimental, le seuil en deçà duquel la procédure de publicité et de mise en concurrence peut être évitée est porté à 100.000 euros HT, dès lors que l’achat en question est considéré comme " innovant " au sens du dispositif (tel est le cas brièvement des biens ou services nouveaux ou sensiblement améliorés ou consistant à la mise en œuvre de nouveaux procédés de production ou de commercialisation.)
On a vu par exemple le cas de l’acquisition par une commune de mobiliers urbains innovants (poubelles intelligentes à compost), d’applications mobiles permettant aux habitants de se prononcer sur un budget communal participatif, ou encore l’acquisition par un office HLM d’outils technologiques de contrôle à distance des températures.
L’intérêt et les bénéfices d’un tel dispositif seront pleinement partagés par les startups et autres PME innovantes, ainsi que les différents acteurs publics. Les premières, si elles devront se confronter aux règles spécifiques des marchés publics, bénéficient ici d’une véritable opportunité de développement auprès des acteurs publics.
Les seconds, si l’usage de ce dispositif devra respecter les grands principes de la commande publique, œuvreront à la modernisation de l’administration et de la ville, tout en affichant une volonté politique de soutien à des startups et PME innovantes, qui sont très souvent implantées sur leurs territoires.
Laurent Bidault est vocat au Barreau de Paris spécialisé en droit public des affaires et Baptiste Robelin est avocat au Barreau de Paris spécialisé en droit des affaires et des nouvelles technologies