Le Kenya attire les entreprises françaises. Selon la chambre de commerce France-Kenya, le nombre d'entreprises françaises implantées au Kenya aurait été multiplié par trois ces cinq dernières années. Mais un fait est encore beaucoup plus surprenant : le nombre de startuppers français venus tenter leur chance à Nairobi est lui aussi en constante augmentation.
" Vous avez ici un grand nombre de startuppers français. Nous sommes une communauté tellement dynamique que nous avons constitué un réseau local de la French tech à Nairobi ", explique Maxime Servettaz – entrepreneur français de 27 ans – qui a fondé Asilimia, une entreprise spécialisée dans le mobile-money. Si le Kenya séduit autant, c'est sûrement en partie en raison de sa stabilité politique. " Les dernières élections présidentielles se sont relativement bien déroulées. Mais selon moi, ce qui plaît tant aux entrepreneurs de la tech, c'est de savoir qu'ils sont dans un pays où les disruptions technologiques provoquées par Safaricom ont redessiné les frontières de l'économie. Et elles ont donné envie à toute une génération de kényans d'entreprendre dans le secteur de la fintech ", détaille l'entrepreneur originaire de la région lyonnaise. Au-delà de cette appétence pour la tech kényane, les entrepreneurs français de la tech apprécient aussi les conditions favorables pour la création d'entreprise. Créer une entreprise au Kenya ne nécessite qu'un apport de 1 000 euros de capital avec 500 euros de frais notariés, selon les autorités kényanes. Ces conditions avantageuses font du Kenya l'un des pays africains les plus attractifs en termes d'investissement entrepreneurial.
Des entrepreneurs français aux profils variés
Les profils de ces entrepreneurs français sont multiples et variés. " Avant d'arriver au Kenya, je travaillais pour une plateforme de mobile-money-appelée Tigo – au Tchad puis en Ouganda. Etant déjà dans la région, nous entendions parler de la grande disruption technologique en cours au Kenya. Je n'ai alors pas hésité une seconde ", explique Paul Langlois-Meurinne – fondateur d'Optimetriks. Mais pour la grande majorité d'entre eux, le choix d'une implantation au Kenya tient à d'autres raisons.
" Beaucoup de gens de la French Tech n'étaient pas des entrepreneurs dans l'âme. Ils le sont devenus après s'être implantés au Kenya, suivant ainsi les choix professionnels de leurs épouses ! ", précise Maxime Servettaz. De son côté, Estelle Verdier – directrice de Jumia Travel – tempère cette analyse. " S'il est exact que la plupart des immigrés français de la tech ont déjà connu d'autres pays que le Kenya avant leur arrivée, ils restent pour une longue durée dans le pays car les conditions pour entreprendre sont bonnes ", explique-t-elle. Puis de conclure : " Dans la plupart des cas, on sait qu'il faut entreprendre pour vivre sur ce continent donc ils sont conditionnés. Cela n'a plus rien à voir avec ces contrats d'expatriation qu'on pouvait connaître à une autre époque, bien que ces pratiques ne soient pas encore révolues. "
Les infrastructures manquantes pénalisent l'activité
Si le Kenya plaît aux entrepreneurs français, il n'empêche que des inconvénients persistent. " Si au Kenya, il est assez simple de licencier, il est, en revanche, plus compliqué d'attirer des investisseurs. Lorsque l'on veut lever des fonds, il faut souvent passer un peu de temps en Europe durant le processus ", explique Maxime Servettaz dont la société Asilimia espère lever 250 000 euros en seed-equity. Face à ces difficultés, Estelle Verdier préfère philosopher. " Entreprendre dans un pays en développement implique de comprendre son environnement. Effectivement, les infrastructures manquent parfois. Mais nous savons dans quelle réalité nous nous embarquons ", dit-elle.
Si l'entrepreneuriat est la clé de voûte d'une immigration réussie au Kenya, le chemin qui mène au succès peut s'avérer parfois sinueux. " Le profil de l'expatrié qui gagné 10 000 euros par mois en étant le VRP d'une entreprise française à l'étranger ne représente plus la majorité. La plupart sont jeunes, de moins de trente ans et ils tentent de bâtir leurs propres entreprises avec 5 000 euros de capital ", explique Maxime Servettaz. Puis il ajoute : " Au Kenya, il faut parfois attendre la septième année d'activité pour que l'entreprise puisse s'installer durablement dans une zone de croissance ", explique Maxime Servettaz. " C'est pourquoi nous avons continué pendant très longtemps à réaliser des missions de consulting pour de grands groupes internationaux ", conclut Maxime Servettaz, qui préfère, dit-il, "commencer petit mais rêver grand "