Liberticide pour les uns, indispensable pour les autres, la reconnaissance faciale s'immisce un peu partout dans les gadgets présentés au CES de Las Vegas: robots, voitures, sonnettes..., destinée à mieux personnaliser les appareils à l'usager. Popularisée en particulier par les iPhone, la reconnaissance faciale permet par exemple au robot Pepper de reconnaître un client entrant dans un commerce ou un hôtel. "Ils pourraient être en mesure de dire 'Ravi de vous revoir, inutile de faire la queue, nous vous avons enregistré et envoyé la clé sur votre téléphone'", explique Steve Carlin, du japonais SoftBank Robotics. Autre utilisation, dans un magasin, Pepper peut reconnaître un client, l'informer que sa commande passée en ligne est prête et lui suggérer de nouveaux achats de façon personnalisée.
La personnalisation - leitmotiv du secteur technologique, c'est aussi ce que promettent certains constructeurs automobiles présents au CES, comme le chinois Byton, qui conçoit des voitures électriques haut-de-gamme et promet une commercialisation pour cette année. La voiture "sait qui est dans le véhicule, depuis combien de temps vous roulez et ce que vous aimez manger, et pourrait vous faire des recommandations de restaurants", explique Abe Chen, de Byton. Même chose pour des suggestions en matières de musique ou de divertissement basées sur les goûts de l'usager, autant de fonctionnalités qui prendront encore plus d'importance à mesure que se profile la voiture autonome.
Quant au taïwanais Cyberlink, il assure que son nouveau système de reconnaissance faciale présenté au CES est "très précis", et à destination des commerces, de la maison et des forces de l'ordre. "Si quelqu'un rentre dans une boutique, on peut adapter un message d'information en fonction de l'âge, du genre ou de l'expression du visage", assure Richard Carriere, de Cyberlink.
Une sécurité supplémentaire ?
D'autres startups, comme l'américain Nortek, intègrent la reconnaissance faciale dans leurs sonnettes ou systèmes de sécurité, pour permettre aux amis et membres de la famille d'entrer dans la maison tout en alertant les propriétaires en cas de présence d'un individu suspect. Idée similaire pour le chinois Tuya, dont la sonnette intelligente utilise l'intelligence artificielle pour identifier les membres de la famille, amis, livreurs et même les animaux, pour créer une "liste blanche" des personnes autorisées. Le système peut en outre être utile pour les foyers pour personnes âgées, par exemple en détectant si une personne démente s'est égarée, souligne la responsable des ventes Sandy Scott.
À l'heure des controverses et inquiétudes autour de la protection des données personnelles, le système de Tuya stocke les informations dans l'appareil, minimisant ainsi les risques de fuites de données, affirme Sandy Scott. Sur une note plus légère, certaines entreprises, comme le géant américain des produits ménagers et d'hygiène Procter & Gamble, ont aussi montré au CES que la reconnaissance faciale peut servir à personnaliser les soins du visage.
Notre visage, le nouveau cookie ?
Vantée par nombre d'entreprises, cette technologie a aussi ses détracteurs, qui en craignent les usages abusifs ou liberticides via la création de bases de données faciales, relevant par exemple que les autorités chinoises usent allègrement de cette technologie pour surveiller leur population. Les commerçants et autres firmes "disposent déjà de toutes les données qui me concernent, sauf mon visage", relève Brenda Leong de l'organisation américaine the Future of Privacy Forum. Pour elle, la reconnaissance faciale "fait de votre visage un cookie", ces petits modules électroniques d'identification qui vous suivent de page en page sur internet pour mieux cibler la publicité.
Certaines grosses entreprises tech sont régulièrement critiquées quant à leurs activités dans ce domaine et la collaboration avec des autorités ou les forces de l'ordre. L'an dernier, plus de 30 organisations emmenées par l'American Civil Liberties Union (ACLU) ont exhorté Amazon à cesser de fournir sa technologie de reconnaissance faciale à la police, estimant que cet outil lui conférait "un dangereux pouvoir de surveillance".
Maddyness avec AFP