Voiture électrique, train autonome, transport par drone… La mobilité cristallise les projets les plus révolutionnaires du moment, qui laissent entrevoir monts et merveilles aux usagers. Alors est-on véritablement au seuil d’une nouvelle ère pour les transports ? Ces folles innovations peuvent-elles vraiment répondre aux attentes des consommateurs ? Et faut-il craindre que ces innovations de rupture puissent charrier avec elles une insécurité, aussi bien physique que sociale ?
“On ne peut pas imaginer de l’innovation sans danger, affirme sans ambage Ferréol Mayoly, directeur général du groupe spécialiste de la location automobile longue durée Arval France. Mais ses bénéfices justifient qu’on s’y intéresse.” A commencer par la voiture connectée, longtemps espérée et aujourd’hui devenue réalité, bien que “les utilisateurs n’en soient pas forcément conscients”, souligne Antoine Dumurgier, directeur général Solutions de mobilités professionnelles chez Edenred. Pourtant, les premières voitures connectées, sur les routes depuis quelques années, permettent à la fois aux conducteurs de “rouler de manière plus sûre, grâce aux systèmes de guidage” mais aussi aux gestionnaires de flottes “d’anticiper des besoins de maintenance, parce qu’il vaut mieux prévenir que guérir”.
Renseigner les consommateurs pour faciliter la transition technologique
Pourtant, la technologie inquiète parfois. Les actualités relatant les accidents de véhicules autonomes, les débats autour de l’éthique des voitures sans chauffeur ou encore les piratages à répétition soulignant les faiblesses des objets connectés peuvent susciter des craintes chez les futurs usagers. “Une partie des solutions qui existeront demain peuvent être tellement nouvelles qu’elles peuvent faire peur, reconnaît Ferréol Mayoly. C’est vrai dans le secteur ferroviaire, aérien, comme dans le secteur automobile.” Et c’est tout l’enjeu pour les acteurs de la mobilité. “Nous devons arriver à gagner la confiance de ceux qui prennent les transports”, tranche-t-il.
Et, plutôt que de les rassurer, d’abord les assurer de la fiabilité des nouvelles solutions de mobilité. “La difficulté réside dans la capacité des utilisateurs à adopter la technologie, analyse le DG d’Arval France. On entre dans une phase d’adoption qui peut se révéler un peu longue.” Pour autant, face aux doutes soulevés par la modératrice de la table ronde, la journaliste Anette Burgdorf, Antoine Dumurgier se montre confiant quant à la pénétration du véhicule autonome dans la population. “Est-ce qu’en 2005 ou 2006, les gens demandaient un téléphone sur lequel on puisse regarder la télé ? Personne, mais les smartphones ont pourtant été massivement adoptés.”
Réduire l’usage de la voiture plutôt que de vouloir la remplacer
Pas question cependant de tous voyager demain en Hyperloop ou en drone personnel. La révolution de la mobilité passe d’abord par un changement, certes peu impressionnant mais pourtant essentiel : la fin de l’hégémonie de la voiture. Or, “si l’on veut que l’usage de la voiture baisse, un des enjeux est de connecter les différents types transports les uns avec les autres pour développer la multimodalité sans couture, sans quoi le véhicule personnel restera la solution la plus facile”, prophétise Mathias Vicherat, directeur général adjoint du Groupe SNCF et troisième intervenant de la table ronde. D’autant que la multimodalité est le seul moyen de connecter avec efficience “des territoires peu irrigués, en fonction de la demande des utilisateurs”, rappelle-t-il.
Aujourd’hui, la voiture reste néanmoins le moyen de transport privilégié par une majorité de Français pour aller travailler. Et demain ? N’en déplaise aux fans de science-fiction, cela ne devrait pas beaucoup changer ! “L’aspect passionnel de l’automobile subsiste, même auprès des jeunes”, constate Ferréol Mayoly. Qui note cependant “un passage de la propriété à l’usage”, soulignant que “de moins en moins de gens veulent acheter leur véhicule” et que les solutions de location ou de partage ont au contraire la cote. Car anticiper la fin de la voiture serait oublier aussi la diversité du territoire et des usages français. “Il existe une vraie différence entre la mobilité en milieu urbain et en milieu rural, note Antoine Dumurgier. Le besoin de voiture va perdurer pendant une longue période, il faut démoyenniser notre raisonnement.” D’où l’objectif pour les acteurs de la mobilité de proposer “une palette de solutions la plus large possible pour répondre aux attentes de chacun, différentes selon les territoires et les âges”, complète Ferréol Mayoly.
Faire écho aux transformations de la société
Des attentes de plus en plus diverses et un niveau d’exigence toujours renouvelé, comme en témoigne Mathias Vicherat. “Les utilisateurs demandent à être considérés commes des utilisateurs au singulier, pas au pluriel. Cela implique d’individualiser les trajets et d’imaginer un rapport individualisé au client.” Avec quelques 5 millions de clients par jour, la SNCF s’est donc lancée dans une “individualisation de masse”. Cette personnalisation du service apporté à l’utilisateur se retrouve également dans les systèmes de paiement des services de mobilité. “Nous voyons émerger, notamment en Europe du Nord, un nouveau mode de consommation des transports, à l’usage ou via un abonnement unique”, remarque Antoine Dumurgier. Certains pays ont en effet mis en place des “pass”, certes onéreux, mais donnant accès à toute une gamme de transports multimodaux. Plus besoin de devoir se ruer sur les billets Prem’s dès l’ouverture des réservations ou de devoir anticiper sa location de voiture six mois avant ses vacances d’été pour ne pas voir les prix grimper en flèche.
Une transformation des usages et des comportements que les acteurs de la mobilité vont devoir intégrer dans leurs offres. “Le télétravail se développe, le salariat évolue, il n’existe plus d’espace d’entreprise unique, liste Mathias Vicherat. Les transports devront accompagner voire devancer ces évolutions sociétales.” Avec un objectif majeur : “développer la citoyenneté active, qui passe par l’éducation, le logement, la santé et de plus en plus par la mobilité ; si l’on veut une citoyenneté active pour tous, il faut rendre la mobilité accessible”. Si les transports drainent aujourd’hui les peurs, légitimes, face au changement, le meilleur est néanmoins à venir, selon Antoine Dumurgier. “Grâce aux nouvelles technologies, les transports devraient devenir plus rapides, plus confortables, moins chers et moins polluants !” Et pour convaincre les plus sceptiques, Ferréol Mayoly, rappelle pour conclure “qu’il y a 100 ans, nos anciens auraient eu du mal à imaginer ce qu’il se passe aujourd’hui”.
Maddyness, partenaire média d’Edenred.