Certains fonds veulent aider les jeunes pousses à devenir des licornes. D'autres préfèrent trouver des arbustes pour en faire des chênes robustes. C'est le cas d'Ardian Growth, le fonds de croissance porté par Ardian, ancienne filiale d'Axa. "On ne fait pas du venture et on n'est pas un fonds classique et généraliste, sourit Laurent Foata, responsable de l'activité Growth. C'est un segment déjà mature aux États-Unis et nous l'avons adapté au marché européen." Le growth, kézako ? "On finance des sociétés technologiques en croissance qui sont déjà rentables et jusque-là auto-financées mais qui ont besoin de fonds pour accélérer, notamment à l'international", explique-t-il.
Exit la détection de pépites qui n'ont pas encore dégoté leur premier client ou les startups en early stage qui tâtonnent pour trouver leur modèle économique. Bienvenue dans la cour des grands qui veulent devenir des géants. Le fonds repère les entreprises qui réalisent au moins 50 millions d'euros de chiffre d'affaires et souhaitent donner un coup d'accélérateur à leur business. "Les entreprises ont une croissance en escalier et nous les aidons à passer certaines marches", souligne Laurent Foata.
Se donner les moyens de la réussite
Ce qui explique que les tickets investis soient conséquents : de 10 à 30 millions d'euros selon les cas. Avec la levée en avril de 250 millions d'euros pour son deuxième véhicule d'investissement, Ardian Growth Fund II, le fonds a les coudées franches. La branche Growth pilote désormais plus de 500 millions d'euros. Et peut s'appuyer sur l'expertise tentaculaire de la marque Ardian, qui dispose de plus de 82 milliards de dollars sous gestion dans ses multiples ramifications.
Sur les quelque 130 entreprises que le fonds a déjà accompagnées, on trouve les startups françaises JeChange, TabMo ou encore BricoPrivé, récemment revendu. L'idée du fonds est de "créer des ponts entre les entreprises pour favoriser les fusions ou les acquisitions", leviers de croissance essentiels à un stade de développement avancé. Or, comme on l'a vu avec le rachat de LastMinute par l'Italien BravoFly - lui aussi dans le portefeuille d'Ardian Growth - quand plusieurs pépites fusionnent, elles ont davantage les moyens de constituer des géants et peser dans leur secteur.
Hausser le niveau de jeu
Le fonds cible ainsi des entreprises européennes, plus spécifiquement françaises et d'Europe du Sud mais pas seulement. "Nous avons commencé par la France mais l'ADN du growth ne peut être qu'international", martèle Laurent Foata. Et le fonds scrute de près les sociétés Tech. "Dans le numérique, c'est l'empirique qui dicte la croissance", se réjouit l'investisseur. Les KPIs règnent en maîtres et l'itération chère aux startups permettent aux financiers de suivre pas à pas l'avancée pour "les faire passer de la L1 à la Ligue des Champions", avance encore l'investisseur.
Pas question pour autant de court-circuiter les entrepreneurs. Le fonds joue le rôle de sparring partner, laissant le chef d'entreprise gérer l'opérationnel. Mais, pour l'épauler, il lui donne l'occasion de rencontrer d'autres entrepreneurs, passés par les mêmes étapes que lui. "Il y a un effet d'identification qui est important pour que le message passe, précise le responsable de l'activité Growth. L'analyse des entrepreneurs investisseurs est très pertinente puisqu'ils ont eux-mêmes vécu cette expérience entrepreneuriale et ont une connaissance très approfondie des marchés. Ce sont des personnes-clés, notamment dans la constitution des boards pour créer de la valeur dans les entreprises que nous accompagnons." Car si la valeur n'attend pas le nombre des années, c'est pourtant en construisant une croissance pérenne que les jeunes pousses peuvent envisager de devenir des arbres centenaires.