Article initialement publié en janvier 2018
Rappelez vous les années 1990. Pour aller au travail, on n’avait guère d’autre choix que prendre sa vieille voiture ou de subir un long trajet en métro ou dans un bus bondé. Pour organiser ses vacances, on pouvait décider de passer des heures dans les bouchons sur l’autoroute ou consulter les fiches horaires des trains à la gare la plus proche. Pas trop de questions à se poser. Aujourd’hui le paysage des transports a été complètement chamboulé. Le marché des trajets urbains se répartit entre taxis, VTC, bus «propres», trams nouvelle génération ou les incontournables vélos en libre-service. Sur les moyennes et longues distances, on a désormais des dizaines de possibilités, entre le train (OuiGo, InOui, opérateurs étrangers…), le covoiturage, les FlixBus et autres Isibus…
Révolutions sociales et technologiques
Les causes de cette révolution sont à la fois règlementaires, sociales et technologiques. Depuis 2009, les voyageurs peuvent emprunter d’autres compagnies que la SNCF pour leurs voyages en train à l’international. En 2020, ce sera aussi le cas pour les lignes TGV françaises, puis en 2023 pour le TER. Le secteur du transport en autocars a été libéralisé en août 2015 par la loi Macron, et les différents acteurs se livrent une concurrence acharnée. Malgré une législation hésitante, les VTC ont doublé les taxis dans les esprits des usagers. Autant de bouleversements étroitement reliés à l’avènement des plateformes et applications. Uber n’aurait jamais existé sans le smartphone. Quand aux TGV low cost OuiGo, ils sont réservables uniquement par Internet.
Mais la principale révolution est technologique. Jusqu’à récemment, lors de l’achat d’une voiture, vous aviez le choix entre l’essence ou le diesel. Point. Il faut maintenant choisir entre la version classique, l’hybride ou le 100% électrique. En attendant la voiture autonome, avec foison de services à cocher : abonnement à Netflix, kiosque de presse Internet, streaming et jeux vidéos, etc. Ceux qui voudront prendre de la hauteur emprunteront un taxi volant autonome, comme ceux qui entreront en service à Dubaï en 2022.
Les inventions à venir s’annoncent tout aussi bluffantes. L’Hyperloop, le train supersonique d’Elon Musk circulant à 1200 km/h dans des tubes sous vide, compte déjà plusieurs concurrents américains, coréens et chinois. Ces derniers affirment même pouvoir atteindre les… 4000 km/h, quatre fois plus rapide que l’avion ! L’avion, justement, ne compte pas se laisser doubler. Fin 2016, la startup américain Boom a lancé son projet d’avion supersonique. Une version moderne du Concorde, plus léger, plus aérodynamique et plus économe en carburant. Elle aurait déjà enregistré 76 commandes. En septembre 2017, EasyJet a annoncé des vols Paris-Londres en avion électrique d’ici dix ans. Certains songent même à relancer les croisières en ballon dirigeable pour traverser l’Atlantique.
Va-t-on se noyer dans un océan de possibilités ?
Bref, le choix de transport est devenu pléthorique. Trop ? A Paris, ces dernières années, entre les vélos gris, vert pomme, orange et jaune fluo, la ville a viré à l’arc-en-ciel. Pour un trajet Lyon-Biarritz, j’ai le choix entre quatre modes de transport, sept itinéraires et des dizaines de tarifs différents, de 58 à…597 euros. Il existe certes des comparateurs comme Liligo ou Tictactrip, mais qui prennent assez mal en compte la «multimodalité». Et le casse-tête n’est pas réservé à l’usager. Les futures stations d’autoroute devront être équipées non seulement de pompes à essence, mais aussi de bornes de recharge électriques classiques et ultra rapides, d’un réservoir à hydrogène, et pourquoi pas de carburant alternatif aux algues et de biogaz. Et on peut faire confiance aux législateurs pour imposer de nouvelles normes. Les promoteurs immobiliers s’arrachent déjà les cheveux à propos du vote en novembre 2017 d’une mesure imposant l’équipement en bornes électriques de 10% des places de parkings pour les bâtiments non résidentiels.
La bonne nouvelle c’est que cette floraison de nouveaux modes de transport a cassé les monopoles. Des milliers de startups innovantes tentent de trouver leur chemin dans ce paysage. Le taxi autonome électrique Navya ? L’oeuvre de la pépite lyonnaise du même nom. La navette SeaBubbles «volant au-dessus de l’eau» ? Inventée par le français Alain Thébaut. Sans compter la pépite Blablacar, qui a franchi le cap des 50 millions de membres et fait partie des deux uniques licornes françaises valorisées plus d’un milliard de dollars. On notera d’ailleurs que la première licorne mondiale n’est autre qu’Uber… un autre spécialiste du transport.