Depuis le début des années 2010, les lieux dédiés aux escape games fleurissent aux quatre coins du globe, et avec plus de 400 établissements, la France n'est pas en reste. Généralistes, thématiques, éphémères... Tous tentent d'innover pour tirer leur épingle du jeu. Parmi eux, Virtual Room a eu une idée pour le moins originale : proposer des sessions d'escape game ... en réalité virtuelle. Le concept est né de la rencontre de deux binômes, issus du secteur du loisirs indoor et de la création de contenu en 3D et VR.
Cherchant à améliorer l’expérience de jeux dans leurs scénarios d'escape games, les deux associés à la tête des salles Escape Hunt - Jean-Luc Gignoux et Jean-Louis Bouthinon - s'intéressent à la possibilité d’inclure des nouvelles technologies dans leurs salles. Ils se tournent alors vers la réalité virtuelle, persuadés qu'elle pourrait être source de multiples opportunités - bien qu'elle en soit encore à ses balbutiements. C'est dans cette optique que les deux hommes s'associent avec un autre binôme, Vincent Kawnik et Thomas Knoll, fondateurs du studio 3D Monsieur K. Ensemble, ils définissent très vite les bases pour mettre sur pied un nouveau genre de divertissement.
De la réalité virtuelle très réelle
Après une année de développement, ils ouvrent en février 2017 leur première salle à Paris avec un concept simple : des sessions d'une heure, coûtant entre 20 et 30 euros par personne, au cours desquelles 2 à 4 joueurs coopèrent virtuellement pour réussir plusieurs missions, au fil de voyages à travers le temps. C'est donc dans leurs locaux du 11ème arrondissement que nous avons testé cet escape game d'un nouveau genre. Répartis dans des box individuels, chacun d'entre nous était alors équipé d'un casque de réalité virtuelle, d'écouteurs et d'un micro qui, une fois portés, permettent de se réunir virtuellement dans un même lieu.
Et c'est parti pour près d'une heure de jeu. Dès le départ, nous sommes conquis : ce ne sont pas tant les décors qui impressionnent - malgré leur réalisme et leur qualité, que le fait d'avoir été "téléporté" en quelques secondes auprès de ses coéquipiers, que l'on peut voir interagir en temps réel avec leur environnement. Équipés de deux manettes, nous pouvons en effet saisir les objets autour de nous, et même nous les lancer. La coopération est d'ailleurs au coeur des missions, qui s'enchaînent toutes les dix minutes pour éviter de rester "bloqués" sur certaines problématiques.
"En ce sens les missions de Virtual Room sont moins déceptives qu'un escape game classique, et les joueurs auront la possibilité de visiter plusieurs mondes quelque soit leur niveau"
Benoît Bouthinon, manager Virtual Room
Verdict ? Entre la découverte des décors qui ne laissent rien au hasard et les casse-têtes à résoudre, on passe clairement un bon moment - et étonnamment on ne ressent pas du tout les effets habituels de la VR dont la typique cinétose (nausées, maux de tête) malgré une exposition prolongée : en effet puisque les déplacements réels - limités à 9m2 - sont reproduits immédiatement dans le casque, il n'y a pas de décalage pour l'oreille interne. C'est d'ailleurs le seul regret après 45 minutes d'immersion : ne pas pouvoir explorer plus les différents mondes. Quoi qu'il en soit, les sessions de Virtual Room restent une très bonne expérience, à fortiori pour les novices de la VR.
Bientôt une trentaine de salles dans le monde
Mais à l’inverse des salles d’escale game classiques, ce qui coûte le plus cher à la startup c’est bien le développement des missions : en optant pour des contenus originaux, la jeune pousse fait logiquement grimper la facture. Mais c’est aussi ce qui fait son succès : en ciblant les jeunes urbains de 25-35 ans fan de VR et d’escape game, Virtual Room a su surfer sur les deux tendances pour asseoir sa domination. Au moment de son lancement, elle a notamment pu bénéficier d’un sérieux coup de pouce niveau communication, avec la venue du Youtubeur Squeezy qui a filmé et publié sur sa chaîne une partie réalisée dans leurs locaux avec ses acolytes aux millions de followers Natoo, Karlito et McFly.
Depuis, la jeune pousse a parcouru bien du chemin, avec la sortie d'une nouvelle mission, et revendique plus de 100.000 visiteurs dans le monde. Virtual Room est en effet propriétaire d’une dizaine de salles à Paris, Bruxelles, Singapour, Los Angeles, New-York, Strasbourg, Londres, Berlin, Bordeaux et Barcelone depuis cette année et a conquis une quinzaine d’autres villes grâce aux franchises, du Brésil à l’Australie. Ses modules de VR sont même intégrés aux visites guidées du musée Madame Tussaud aux États-Unis. Mais la jeune pousse ne compte pas s'arrêter là et prévoit d'en ouvrir une quinzaine de plus courant 2018. Il faut dire qu'à l'exception de deux autres startups à Paris - dont une hébergée dans les locaux de The Family, elle n'est freinée par aucun concurrent sur ce créneau, profitant donc d'un boulevard pour se développer.
Mais alors pourquoi ne pas avoir développé sa solution sur internet ? "Parce que le côté collaboratif est trop important dans nos jeux, et puis les gens ne sont pas encore assez équipés", analyse Benoît Bouthinon. Il faut dire que la technologie VR est encore loin d’être accessible au grand public : pour un dispositif comme celui de Virtual Room, comptez un ordinateur par personne, plus un autre pour faire office de serveur, en plus des casques, micros et oreillettes. Coût d’aménagement d’une salle pour la jeune pousse : entre 200 et 300.000 euros, en comptant l'aménagement des locaux. Un investissement conséquent qui explique pourquoi les ménages sont toujours si peu équipés.