C'est un fait : les femmes sont encore discriminées dans le cadre de leur travail, qu'elles soient salariées ou non. Mais, d'après une étude réalisée par la Women Initiative Foundation en partenariat avec BNP Paribas Banque Privée, menée en France, en Allemagne et en Italie, tous les aspects de l'entrepreneuriat ne sont pas également impactés par le genre. Faisant suite au premier volet réalisé en début d’année auprès de grands groupes, elle devrait permettre de mieux comprendre les freins à l’entrepreneuriat des femmes et d’identifier des pistes de réflexion pour améliorer la situation. À noter qu'en France, sur les 225 répondants, 74% étaient des femmes.
Premier enseignement de cette étude : il n'existe pas de différence dans la façon dont les femmes et les hommes se décrivent en tant qu'entrepreneurs : tous et toutes se disent pragmatiques, à l'écoute de leurs équipes et combatif. Enfin dans les trois pays, la motivation principale à entreprendre est liée à l’environnement salarial insatisfaisant - un sentiment amplifié chez les moins de 35 ans.
Petite entreprise mais gros sacrifice
Mais, mauvaise nouvelle, les facteurs sur lesquels le genre des startuppers a une réelle incidence sont nombreux. En premier lieu, la situation familiale : d'après l'étude du WIF, les femmes sont deux fois plus souvent célibataires que les hommes (en Allemagne ce sont 80% des entrepreneures qui sont célibataires et sans enfant !). En France, elles sont 29% à ne pas avoir d’enfants contre 10% des hommes). Comme dans les grands groupes, les femmes semblent avoir plus souvent que les hommes été obligées de choisir entre vie privée et vie professionnelle.
La taille et le chiffre d’affaires des entreprises sont aussi légèrement inférieurs pour les femmes, qui entretiennent tout de même un rapport différent au capital : 90% d'entre elles souhaitent garder le contrôle du capital contre 67% des hommes. Elles sont aussi moins nombreuses à s’associer (36% contre 59% pour les hommes) et plus frileuses à l’égard d’une fusion (55% l’envisagent contre 72% des hommes), d’acquisition ou de création de filiales (-10 points pour les femmes). Si les entrepreneures sont également plus prudentes dans leurs investissements, le genre impacte peu les statistiques en termes de développement à l’international.
Seules les Françaises identifient, pour 42% d'entre elles, des difficultés d'accès au financement - un paramètre déjà relevé lors de nombreuses études. Sur les facteurs expliquant le moindre pourcentage de femmes chez les entrepreneurs, les répondants citent en premier lieu l’impact des contraintes familiales dans les trois pays. En France et en Allemagne, l’autocensure et le manque de confiance en elles des femmes sont fortement cités par les femmes (86% des Françaises et 66% des Allemandes). Des questions peu évoquées en Italie (19% des femmes et 11% des hommes) où les freins seraient plutôt liés aux résistances de la société.
Le mythe de l'entrepreneur masculin
Qu'en est-il des préjugés liés aux différences de gestion selon le genre ? D'après l'étude, si les hommes ne perçoivent pas de différence entre le management des hommes et des femmes - le qualifiant de motivant, orienté business, à l’écoute et humain - les femmes opposent d'elles-même management masculin ("autoritaire") et féminin ("à l’écoute" et "humain"). De même, les hommes comme les femmes se perçoivent eux-mêmes comme combatifs, à l’écoute, et pragmatiques. Mais les entrepreneures voient leurs homologues masculins comme ambitieux, stratèges, sûrs d’eux, autoritaires et peu à l’écoute.
Il semblerait ainsi que le mythe de l’entrepreneur masculin sûr de lui et stratège reste bien présent dans l’esprit des femmes, alors même qu'il serait assez éloigné de la réalité (ou du ressenti des premiers concernés). Une dissonance qui pourrait expliquer en partie les phénomènes d’autocensure des femmes à l’entrepreneuriat, mais qui traduit surtout le travail d'information qu'il reste à faire auprès des hommes, qui ne réalisent pas toujours les discriminations dont sont victimes leurs consoeurs.