Tribunes par Romain Passilly
27 mars 2018
27 mars 2018
Temps de lecture : 4 minutes
4 min
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Startupers, ayez le sens du mandat social

Romain Passilly, cofondateur de la startup Fred de la compta, revient dans un post Medium sur les obligations morales et sociales auxquelles doivent faire face les startups, notamment envers leurs salariés.
Temps de lecture : 4 minutes

L’an dernier, la lecture du livre de Mathilde Ramadier " Bienvenue dans le nouveau monde, comment j’ai survécu à la coolitude des start-ups " m’a laissé une drôle d’impression. Dans cet ouvrage, elle dresse un portrait au vitriol du monde des start-ups basé sur son expérience personnelle.

Elle dénonce " un nouveau capitalisme sauvage qui dissimule la loi de la jungle sous une brume de cool ". Un monde peu reluisant forçant sur la novlangue pour inciter des jeunes à travailler comme des forcenés. Un écosystème où la juste gratification du travailleur est habilement sous-évaluée au prétexte qu’il prend part à la construction du monde de demain. Ce pamphlet n’est pas totalement gratuit, la jeune femme, diplômée d’un master de philosophie à Normal Sup’, essaime son livre d’analyses pertinentes et d’exemples concrets.

Evidemment je ne partage pas la totalité de son point de vue, la généralisation est toujours un danger, mais sur pas mal d’aspects, elle est dans le vrai. Elle a le mérite de soulever un problème qui existe bel et bien, et là-dessus je la rejoins volontiers. Le startuper, tout comme chaque dirigeant d’entreprise, n’est en rien exempt de son mandat social. 

 

Le devoir social, une composante parfois oublié de l’entrepreneuriat

La voix de Mathilde Ramadier n’est pas la seule à s’élever pour dénoncer ce désenchantement entrepreneurial. Des dérives existent bel et bien, ce n’est pas la norme heureusement, mais force est de constater qu’une partie de la " startupsphère " vit parfois dans un monde parallèle. Une start-up ne doit pas, sous couvert d’un management par le " cool ", imposer un diktat social. Il existe des règles, un code du travail, le travailleur doit être respecté, du free-lance au stagiaire en passant par le salarié, car il s’associe à votre projet. Je suis dirigeant de start-up, j’ai des semaines monstrueuses de travail et j’espère qu’un jour je serai rétribué à la hauteur des risques que j’ai pris. J’ai fait un choix.

Mais en aucun cas, je n’ai le droit d’ériger mon propre investissement comme une règle de fonctionnement dans mon entreprise. Une start-up ne peut calquer son modèle de développement économique sur son mandat social.

Le créateur d’entreprise nourrit quotidiennement son souhait d’être son propre patron, il est de ce fait redevable envers la société d’obligations salariales et fiscales, mais aussi d’obligations morales et sociales. 

La start-up est le lieu idéal pour réévaluer le rôle du stagiaire dans notre société

Maintes fois abordé, le thème du stagiaire " chair à canon " sur notre marché du travail atomisé n’est pas un sujet nouveau. Dans de grandes entreprises, il remplit fréquemment les missions d’un salarié, sans le salaire qui va avec, et son poste subit une rotation telle, qu’une toupie en aurait le tournis. Qu’en est-il du rôle des stagiaires dans les start-ups ? On ne peut pas affirmer, d’un côté que nous œuvrons pour une nouvelle forme d’organisation au travail, et de l’autre, utiliser des pratiques d’un autre temps. Prendre une pléthore de stagiaires sans aucun poste ouvert derrière, même dans une start-up, ce n’est pas normal. Notre mode d’organisation ne nous exempt pas non plus de notre devoir de formation. Le marché actuel du travail est atomisé et la plupart des dirigeants d’entreprise se plaignent d’un déficit de formation dans de nombreux domaines. Le startuper doit offrir des compétences aux plus jeunes, les stagiaires, dans une stratégie de " win — win " qui ne repose pas seulement sur un beau discours rodé pour servir un storytelling millimétré. La philosophie d’un startuper est de rendre le monde meilleur. Cette révolution commence déjà de l’intérieur.

Ne pas rougir de son succès

Assumer et remplir certains de ses devoirs, n’est pas un discours d’anti-libéralisme primaire, loin de là.

Oui, le startuper mérite l’argent qu’il gagne, il a pris des risques et a mis sa vie entre parenthèses sans aucune assurance de succès. Il n’a donc certainement pas à rougir de son succès, tant que celui-ci se construit sur un pacte moral et social.

Evidemment, tous les startupers ne sont pas égaux devant les difficultés rencontrées mais cette règle doit s’appliquer à tous. Effectuer une levée de fonds de 30 000 euros ou de 3 millions d’euros ne décharge pas le startuper de ses devoirs. Si c’est trop compliqué de rémunérer les personnes alors pourquoi ne pas partager la valeur ? Il faut que la redistribution des richesses créées ait lieu entre l’entreprise et la communauté mais aussi entre dirigeants et salariés.

Pour conclure, je réitère que la généralisation est toujours un danger, cette tribune s’adresse donc de manière indifférenciée à ceux qui souhaiteront eux-mêmes se reconnaître ou non. Le startuper est nécessaire à notre société à bien des égards, son mandat social également.

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Article original à relire sur le Medium de Romain Passilly

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