Le 11 décembre 2017, Numa inaugurait #techforplanet, un événement réunissant autour d’engagements et de solutions concrètes, 31 startups, 4 grandes entreprises et de nombreux  ambassadeurs prestigieux… Il n'aura fallu que 25 jours pour en créer la ligne éditoriale et convaincre des speakers de haut rang de se joindre à l'aventure. 25 jours qui sont le résultat d'années de bonnes connexions et d'heureux hasards (provoqués). Une leçon de networking, que raconte Arnaud Chaigneau, qui pourrait inspirer plus d'un entrepreneur.

A chaque nouvelle saison de l’Accélération de Numa, je fais une courte intervention sur l’art délicat du networking et explique la théorie des graines. Chaque rencontre, chaque interaction humaine est une graine. Elle peut mourir, elle peut faire naître une mauvaise plante, elle peut aussi faire grandir un séquoïa ou un baobab. Parfois, sur une séquence précise, toutes ces graines se révèlent et  toutes ces petites planètes s’alignent. Il y a une clé à cette magie. L’organisation, en 25 jours, du TechForPlanet en est une illustration. 

Lors de cet événement, quelque chose a été enclenché. Quelque chose qui doit grandir. Quelque chose qui doit permettre de dire aux premiers lanceurs d’alertes, que nous avons compris, et que nous allons, maintenant, tout tenter pour réparer.

Nous avons organisé cet évènement en 45 jours. J’ai, plus personnellement, crée la ligne éditoriale et validé les speakers en 25 joursIl y a peut être là, je crois, une histoire à raconter et quelques enseignements à en tirer 

27 novembre 2017, Le Monde

 Si il y a un truc pour lequel je suis assez mauvais, ce sont les process. C’est pas mon truc.

 J’entends que c’est essentiel mais ils interdisent de prendre les chemins de traverse et donc de voir le paysage. En revanche ils ont l’utilité du Phare. Il ne faut pas trop s’en éloigner et on doit pouvoir les voir de loin. Lors de la première réunion edito nous avons donc défini de gros process : listing des speakers, process d’identification, process de première prise de contact, process de seconde prise de contact, mail type de sollicitation, mail type de relance… 

J’ai imprimé le tableau.

Et je me suis demandé ce que nous voulions, en fait, vraiment raconter. La raison de vivre de cet évènement était intuitivement évidente pour tous. Marie Vorgan et Emmanuel Léger l’ont proposé à l’Elysée avec une conviction forte et évidente : à la veille du One Planet Summit où la Finance devait s’aligner sur les  enjeux du climat, il était important de donner la parole aux entrepreneurs car ce sont eux qui portent les solutions. Mais comment illustrer cela sans être dans le solutionnisme et en proposant un fil conducteur cohérent ?

Le 26 novembre 2017, Le Monde publiait une tribune signée par 15 000 scientifiques et posant une ultime alerte sur la situation écologique de la planète. Quelques jours plus tard, à la Sorbonne se déroulait la Cité de la Réussite dressant à nouveau la liste  des enjeux climatiques et interpellant scientifiques, entreprises, associations, citoyens sur l’urgence d’agir. La tribune du Monde a été signée, entre autres, par Gilles Boeuf. Ce sera donc notre premier speaker.

#1 Gilles Boeuf

Gilles-Boeuf 

Ex président du Muséum d’Histoires Naturelles, Professeur au Collège de France, Professeur à l’Université Pierre et Marie Curie, Président de l’agence française pour la biodiversité, Gilles Boeuf est un spécialiste mondial des enjeux de la biodiversité.

J’ai rencontré une première fois Gilles trois mois avant le TechForPlanet lors d’une conférence  organisée par le réalisateur Luc Jacquet. Trublion de réunion, il n’arrêtait pas de bondir et de rebondir sur les idées. Regard affuté, geste enveloppé, chaque intervention était un point d’intelligence et une animation passionnée. J’ai ensuite écouté son podcast puis je l’ai recroisé par hasard aux Grands Voisins avant une intervention. Nous avons échangé nos numéros de téléphone et nous sommes dit qu’il faudrait, peut être, un jour prendre un café.  

C’est à l’écoute de ses podcasts que l’idée d’introduire le TechForPlanet par Gilles Boeuf est venue. Le risque absolu de cet évènement était de “faire un truc de startupper”. Walter Bouvais, le confondateur du magazine Terra Eco, avec qui j’ai beaucoup échangé sur la ligne éditoriale, m’a transmis un article qui alerte sur le solutionnisme tech qui précise “si vous, les geeks, faites avec l’environnement et la planète ce que vous faites avec les relations humaines… ca va être vraiment la m…”. Il fallait marier ces univers. Enclencher l’évènement par un biologiste offrait une tribune devant un public nouveau et écartait les tentations solutionnistes ou égocentrées de la communauté tech.

Je me suis rendu à la Sorbonne et j’ai échangé avec Gilles suite à son intervention. Il a chamboulé son agenda et m’a donné son accord. J’avais une première composante de la ligne éditoriale de l’évènement et une partie de son ADN. Il manquait l’Émotion.

#2 Luc Jacquet

lu-jacquet

 J’ai rencontré Luc Jacquet dans une bulle.

Du 22 juin au 7 juillet, Damien Grimont, créateur de la Solidaire du Chocolat, a eu l’idée folle d’affréter, à l’occasion des 100 ans de l’entrée en guerre des États Unis pour libérer l’Europe, le Queen Mary 2. L’aventure The Bridge débutait à Cherbourg, puis St Nazaire et se terminait à New York le 3 juillet 2017. A son bord, de grandes entreprises de l’Ouest, des startups, des scientifiques, des artistes, des sportifs… des sachants et des “faiseux”. Maximilien Rouer, que j’avais rencontré pendant la campagne YesWeCrowd, m’a proposé de les rejoindre avec une petite équipe de Numa pour animer les ateliers et organiser quelques interventions. L’idée de Damien était de créer une bulle, hors du temps, hors du web sans connexion internet avec 1h de téléphone pour la semaine. 

C’est à cette occasion que je me suis rendu à une conférence de Luc Jacquet. À la fin de son intervention, je lui ai demandé pourquoi celle-ci avait été si triste. Nous nous sommes posés et il m’a expliqué qu’il avait le sentiment d’être bloqué. Malgré un Oscar, des films, des documentaires, des images vues par des milliers, des millions de gens, comment mesurer concrètement l’impact de son travail ? Au delà de la prise de conscience, comment cette émotion reçue a pu créer de nouveaux usages plus responsables ? Le reste du séjour et les quelques jours ensuite à New York ont alimenté nos échanges. En revenant à Paris, j’ai organisé un déjeuner avec Marie Vorgan et j’ai proposé du temps. Une confiance et une amitié se sont installées.

Puis il y a eu TechForPlanet.

La première idée de Luc était de placer l’ensemble du public dans une boîte et d’y projeter l’effondrement de glaciers. Émotion garantie. Les conversations avec les partenaires étant, elles-mêmes, en cours, un doute sur la capacité à tenir financièrement la chose nous a invité à revoir la copie. La seconde solution imposait de placer Station F dans le noir complet. Et l’extérieur aussi. Donc la BNF. Ne sachant pas, par ailleurs, provoquer la nuit, nous avons opté pour une solution plus intimiste.  

Pour marquer les esprits, il fallait introduire TechForPlanet avec la projection de la Glace et le ciel. Pathé donna son accord. En parallèle, je sollicitais Quentin Sannié et l’équipe de Devialet pour créer une expérience sonore immersive. Plongé dans le noir, le public allait vivre et ressentir l’effondrement d’un glacier Arctique. Thanks to Johnny, la préfecture de Police s’est concentrée sur le week-end précédant notre événement et nous avons reçu validation pour la dépose du conteneur en 4 jours.

Il y aurait donc l’Émotion.

Il fallait maintenant passer à l’Action.

#3 Bertrand Piccard

 piccard

Il était dans la liste. Bertrand était un must have. Sa présence et l’annonce de l’Alliance mondiale pour les technologies propres permettrait d’affirmer la ligne éditoriale : il existe des solutions pour la planète. Le soir du 26 novembre, je suis invité à l’événement David et Goliath organisé par Raise, par Paul Jeannet avec qui je travaille en parallèle sur un sujet de publication. Pendant l’évènement, comme à chaque fois, je propose à mon collègue un challenge en arrivant : pitcher le TechForPlanet auprès de 2 grands comptes pour les associer à l’évènement et récupérer les coordonnées de 2 lauréats.Nous avons fait un four. J’ai bien rencontré ces 2 CEO mais mon pitch a eu l’effet d’un avis fiscal.  

Au moment de partir, Paul m’attrape par l’épaule et me présente à une dame : Tiens Arnaud, toi qui est souvent sur des sujets un peu hors du temps, je te présente Fabienne. Il y a peut-être de jolies idées

Moi : “Merci Paul. Bonjour Fabienne. Qu’est ce que vous faites ?

Fabienne : “Je travaille dans la communication. Dans les sujets peu ordinaires, j‘ai dirigé le Vendée globe d’Éric Bellion pour la différence. J’ai aussi fait partie de l'équipe pour le tour du monde de Solar Impulse, l’avion à énergie solaire.”

Hello Hello

Fabienne m’a expliqué comment solliciter Bertrand et elle m’a mis en relation avec son équipe. Elle m’a également transmis les coordonnées de Jérôme Delafosse d’Energy Observer. Le surlendemain, à la Sorbonne, j’ai rejoint Luc Jacquet et je lui ai raconté cette histoire : C’est fou ça. Si tu veux, je peux aussi lui envoyer un sms ou un mail à Bertrand

Je suis donc passé par les équipes et j’ai demandé à Luc d’adresser un court mail pour assurer du sérieux de la démarche. Après plusieurs échanges dans lesquels j’ai bien expliqué l’alignement de calendrier avec le One Planet Summit et l’annonce de l’Alliance, nous avons reçu un go. Sugar on the cake, l’équipe m’a mis en relation avec Jonathan Derain qui s’est occupé du Tour du Monde et qui a été une aide précieuse sur la tenue de l’événement.

Avec l’intervention de Bertrand, la ligne éditoriale prenait chaire : après le temps de l’alerte, venait celui des solutions. L’introduction via la Glace et le Ciel mettrait en avant le premier lanceur d’alerte, Claude Lorius, et nous pouvions ensuite ouvrir sur la recherche de solutions par la communauté Tech. Pendant l’évènement un cycle de 2 interventions dont celle de Gilles Boeuf seraient consacrées à la manière dont nous pouvions nous inspirer de la nature. Pas de solutionnisme, pas d’égocentrisme mais un véritable lien entre l’environnement, l’écologie et la tech.

#4 Charlotte Aubin Kalaidjan

greenwishpartners

Avant de participer à la campagne YesWeCrowd et rejoindre Numa, j’ai co-fondé, il y a 15 ans Intuiti. Et il y a, ici aussi, un lien de cause à effet. En 2004, au début de l’agence, j’ai appelé celui qui était à l’époque directeur éditorial du groupe Veolia : Ludovic Roubaudi. Le premier contrat de l’agence fut signé avec son groupe. Pour l‘anecdote, j’avais proposé à Ludovic un devis de SEO qu’il m’a refusé le vendredi. Le lundi, à 9:45, je l’ai rappelé pour lui demander les clauses à revoir et être acceptable. Il a posé les conditions puis il m’a dit :

C’est amusant car à 9:00 j’avais appelé votre concurrent pour lui dire qu’il avait gagné. Mais il était absent et je devais le rappeler. Je lui dirai donc l’avoir appelé ce matin pour lui annoncer qu’il avait perdu. Ceci étant, vous savez Monsieur Chaigneau, vous ne ferez jamais d’argent avec Veolia

En 2017...

  • Le groupe Veolia a représenté le plus important client de l’agence.
  • La personne qui organise au sein de Richard Attias et Associés le One Planet Summit, le 12 décembre, s’appelle Karin Roubaudi.

Le 27 novembre, j’ai donc appelé Karin pour m’inviter à prendre un café afin d’identifier les speakers qui venaient le 12 décembre au One Planet Summit et que je pourrais inviter le 11 décembre. Charlotte Aubin Kaladjian est apparue comme une évidence.

Charlotte Aubin Kalaidjian est fondatrice et CEO de GreenWish Partners, un pionnier des énergies renouvelables en Afrique sub-saharienne. Depuis 2014, GreenWish a réalisé une levée de 270 millions de dollars de fonds propres, et finalisé le développement, le financement et la mise en service de la première centrale solaire indépendant d’Afrique de l’Ouest, la centrale solaire PV Senergy 2. En clair, GreenWishPartners est en train de constuire un accès à l’énergie solaire sur une partie de l’Afrique de l’ouest.

Grande Dame, grand projet, et une intervention qui symbolise pleinement le lien entre du 11 Décembre #TechForPlanet et celui du 12 #OnePlanetSummit.

#5 Jérôme DelaFosse et Victorien Erussard

energy-observer

La première personne à m’avoir parlé d'Energy Observer était Fabienne Lemaignen (David & Goliath, le cocktail). La deuxième fois c’était au moment du café avec Karin. La troisième, lors de la Cité de la Réussite à la Sorbonne. C’est une trinité. Cela se respecte.

A la Cité de la Réussite, Luc m’a présentée Pascale Berruyer, directrice du programme d’open innovation du CEA (Centre d’Energie Atomique et aux énergies alternatives). Pascale m’a proposé plusieurs noms d’entrepreneurs et de startups que nous pourrions inviter au TechForPlanet et m’a proposé de contacter Victorien Erussard.  Du coup, j’ai appelé Jérôme et Victorien qui, entre deux voiles, ont accepté de nous rejoindre.

#6 Dirk Ahlborn

hyperloop

Barack Obama.

Il y a deux ans, j’ai rencontré à Numa Olivier Moulierac et Mondher Abdennader, venus présenter le festival Les Napoléons, alors peu connu ou peu compris. Le 2 décembre 2017, les Napoléons invitait le 44ème Président des États-Unis à la Maison de Radio France.

En décembre 2015, aux Napoléons de Val d’Isère je fais plusieurs rencontres formidables dont Fanny Pechiodat, Anne Méaux, Quentin Sannié et beaucoup d’autres que je ne peux citer ici sans me lancer dans une liste à la Prévert. Dirk Alhborn intervenait pour présenter Hyperloop, que je ne connaissais pas. La manière dont s’organisait ce projet (par crowdsourcing), le potentiel de l’objet qui allait recomposer, comme l’avait fait le TGV, le territoire et les villes, m’a paru démentiel et j’avais gardé contact avec Dirk.

Quelques semaines avant TechForPlanet, j’ai reçu un mail de Dirk annonçant l’installation d’Hyperloop Transportation à Toulouse et proposant que l’on se rencontre. La rencontre ne s’est pas faite mais j’ai alors proposé à Dirk de revenir à Paris le 11 décembre, explosant totalement, pour le coup, un agenda tenu au cordeau entre New York, Tokyo, Los Angeles et Joannesburg. Son intervention a été l’un des moments clés de l’événement. Hyperloop Transportation est une véritable réponse aux enjeux de transport, de recomposition des villes, de flux des personnes et le projet tient ses engagements environnementaux.

A suivre…

#7 Blue Turn

 Salut Arnaud, c’est Walter (Bouvais, NDLR). Je t’envoie une vidéo. Regarde là et rappelle moi.

Dites moi que vous êtes resté hypnotisé par la fragilité et sa beauté. Moi j’ai pleuré. Alors, j’ai appelé Jean Pierre Goux et j’ai harcelé chaque personne de l’organisation pour qu’elle puisse prendre 15 mn et regarder cette vidéo.

Regardez la vidéo.

Alors nous organiserons la nuit et le silence. Nous projetterons Blue Turn lorsque le Président arrivera, puis encore une fois à son départ.

Regardez la vidéo.

Morale : ne réagissez pas comme des cons égoïstes et autocentrés

Nous sommes le 7 décembre 2017. L’ensemble des speakers ont accepté et la ligne éditoriale s’adapte, sans fléchir, aux enjeux de l’évènement et des partenaires. La qualité de la promesse de l’événement, l’association du TechForPlanet au One Planet Summit, la présence (supposée) du Président de la République, la force, l’image et le rayonnement d’une marque comme Numa me font finalement dire que c’était tout à fait possible, presque facile.

Ca ne l’était pas. Cet événement est la séquence ultime alignant sur une période courte toutes les graines semées ici et là depuis 15 ans par NUMA et aussi, un peu par moi. C’est ce que j’essaie de faire comprendre aux startups de l’Accélération. 

Non ne réagissez pas comme des cons égoïstes, auto centrés. Non ne fonctionnez pas comme des Wisigoth ou des tueurs de trolls car l’arrogance et la suffisance laissent une marque indélébile. Provoquez la magie des rencontres. Pas de celles que porte l’égo, pas de celles qui comptent d’abord pour soi mais les rencontres qui allient, comme la chimie, deux matières différentes pour en créer une nouvelle.

Je ne crois pas au hasard. Je crois évidemment à la bienveillance mais c’est une substance rare et fragile. Il y a des clés à ces rencontres : un constat commun, une curiosité réciproque, un alignement d’intérêt, une considération normale et un peu de risque.

Et c’est assez merveilleux de provoquer cela. C’est une véritable alchimie, une forme de magie.