L'aventure commence à La Rochelle, en 2009. Frédéric Coulais et Alain Mevellec ont l'idée d'une plateforme permettant aux entreprises de gérer leur facturation. "C'est un besoin commun à toutes les entreprises, souligne Frédéric Coulais. Et un investissement nécessaire : un système de facturation bancal, c'est de l'argent en moins qui rentre dans les caisses, donc moins de croissance et, à terme, la mort d'une entreprise."
Or, il y a huit ans, les deux entrepreneurs constatent rapidement que peu de solutions sur le marché correspondent à ce que les entreprises recherchent. "La facturation était alors peu traitée via le modèle SaaS. Et ça posait problème parce que les solutions plus importantes étaient coûteuses et difficiles à déployer. La seule alternative restait la facturation sous Word, à la main, très peu fiable."
Les deux hommes imaginent donc ce qui va constituer la première fonctionnalité de leur plateforme. Après un an de développement, l'outil MyFacture est lancé en 2010. Et ça fonctionne. Loin d'être un simple gadget, la solution s'impose dans les entreprises et reste, à ce jour, la fonctionnalité la plus importante de la plateforme, depuis renommée Sellsy : en 2016, pas moins de 900 millions d'euros de factures ont été payés grâce à la solution.
Passer d'un service de facturation à une plateforme multitâches
Petit à petit, au fur et à mesure des demandes et des besoins identifiés chez leurs clients, Frédéric Coulais et Alain Mevellec étoffent les fonctionnalités de Sellsy. Côté facturation, bien sûr, avec par exemple la possibilité d'envoyer automatiquement ses factures par courrier directement via la plateforme ou de les signer grâce à la signature électronique mais aussi de calculer sa marge sur chacune des factures envoyées. Mais Sellsy ne s'arrête pas là et étend sa R&D - un budget d'un million d'euros rien que pour l'année dernière - à bien d'autres domaines, comme les ventes ou le marketing. Au total, la plateforme compte aujourd'hui une trentaine de modules.
"L'idée est d'éviter que nos clients doivent recourir à une plateforme différente pour chacune de leurs unités business, précise Alain Mevellec. Non seulement ça leur coûte beaucoup plus cher mais les solutions ne sont pas forcément interopérables entre elles, ce qui ralentit le travail des équipes." Sellsy a donc pris le parti de développer des fonctionnalités pour les différents métiers de l'entreprise... dans différents domaines. Certaines vont davantage cibler le retail, d'autres les services, à l'instar de SellsyPhone qui permettra dès cet été de téléphoner directement depuis la plateforme et devrait particulièrement intéresser les centres d'appels.
Grâce à ce positionnement multi-sectoriel et à une offre personnalisable en fonction du nombre de modules utilisés et de collaborateurs utilisateurs, Sellsy a convaincu des clients aux profils très différents. De nombreuses entreprises de l'écosystème startup, à l'instar du Petit Ballon, d'A/B Tasty ou encore de The Family, utilisent la solution. Mais cette dernière est également prisée par certains grands groupes, comme plusieurs unités du groupe M6 ou des Echos. "Au fur et à mesure que nous développons de nouvelles fonctionnalités, nous pouvons toucher des entreprises de plus en plus grandes", se réjouit Alain Mevellec.
De La Rochelle aux Etats-Unis
Signe particulier : le développement de l'entreprise s'est fait depuis La Rochelle, où son siège est installé et qui reste le centre névralgique de la startup malgré l'ouverture d'un bureau à Paris. "Cela nous permet d'offrir à nos salariés une qualité de vie très différente de ce qu'ils auraient à Paris : nos bureaux sont à 200 mètres de la plage !", s'enthousiasme Frédéric Coulais. Cette implantation garantit aussi à Sellsy une meilleure rétention des talents, qui font souvent un choix de vie en s'installant dans l'Ouest et sont donc moins susceptibles de quitter l'entreprise.
Cet ancrage n'empêche cependant pas Sellsy de regarder au-delà des frontières françaises. La plateforme possède une version internationale depuis 2013 et est déjà utilisée par des clients dans une cinquantaine de pays. La startup souhaite désormais aller plus loin et ouvrir des bureaux à l'étranger pour accélérer ses ventes. En Europe d'abord, où elle cible plus particulièrement le Royaume-Uni et l'Allemagne.
Ce qui passera forcément par des recrutements locaux. "Nous avons un lien solide avec nos clients et cela nécessite forcément d'avoir quelqu'un sur place, qui connaît bien le marché local, pour pouvoir préserver ces relations avec les clients étrangers", estime Alain Mevellec. Sellsy a donc appris de ses erreurs : la startup avait ouvert un bureau à New York en 2014 et y avait envoyé un salarié français... qui était rentré au pays à peine huit mois plus tard. Mais l'entreprise compte bien profiter de la création de cette filiale pour retourner aux Etats-Unis dès que possible continuer cette aventure américaine inachevée.
Grâce à une prochaine levée de fonds - actuellement en cours - Sellsy pourra envisager les prochains mois avec sérénité, même si l'entreprise a atteint la rentabilité il y a deux ans déjà. La jeune pousse veut continuer à innover et vise un budget R&D de 7,5 millions d'euros à l'horizon 2022. Et ainsi continuer à créer les modules dont ses 3000 clients et 15 000 utilisateurs ont besoin.