Pour Mehdi Sakaly, CEO de la World Gaming Federation, le e-sport et ses 300 millions d’adeptes est à coup sûr devenu "un divertissement à part entière". Preuves en sont, selon lui, de nouveaux métiers créés autour de cette discipline, ou "ces ostéopathes qui se spécialisent dans les pathologies liées au e-sport". Innovant avant l’heure, ce dernier absorbe déjà les mutations des contenus. Déjà, il intègre la réalité virtuelle, et la volonté d’hyper-personnalisation. "On n’a pas envie d’être dans une narration subie, une narration linéaire qui nous enferme dans un schéma de pensée", confie à ce propos Mehdi Sakaly.
Cette individualisation du divertissement dépasse toutefois les seules frontières du e-sport. A en croire Virginie Lubot, directrice exécutive adjointe chez Prisma Media, ce serait même "la prochaine étape" pour tous les contenus.
Elle imagine par exemple avec son équipe un média d’information personnalisé à l’extrême, en fonction de nos centres d’intérêt, mais aussi de notre rythme de vie, ou du mode de lecture que l’on préfère (vidéo, article, etc). Chacun doit pouvoir choisir. Ce que la youtubeuse YouMakeFashion approuve aussitôt : "j’ai pensé à fermer mon site ou ma chaîne, parce qu’en un snap ou un post Instagram, je touchais plus de monde. Mais il faut que les gens puissent [alterner], entre un snap quand ils sont aux toilettes ou une vidéo youtube lorsqu’ils ont plus de temps".
"Difficile de convaincre de payer pour du contenu"
Toujours est-il que les nouveaux modes de divertissement coûteraient cher... Et rapporteraient peu. Du moins, c’est ce que confient des entrepreneurs du secteur, qui estiment qu’il faut désormais chercher de nouveaux business models.
Tonjé Bakang, CEO d’Afrostream, un service de streaming en ligne, raconte ainsi comment lui a réussi à mettre "l’innovation au service du business". "C’est devenu difficile de convaincre l’utilisateur lambda de payer pour du contenu. Alors on a créé un social media en plus de celui-ci, pour former une communauté d’intérêt. Les gens peuvent se faire un blog, écrire des articles. Maintenant, c’est payant. Parfois, l’innovation c’est juste bien comprendre sa cible, ajoute le fondateur. L’innovation vient souvent de la base. Si vous écoutez comment elle fonctionne, vous savez quel service [lui] proposer."
Maxime Barbier, créateur de MinuteBuzz, devenue simple plateforme après avoir été un site classique, acquiesce : "il y a eu une grosse mutation des usages, il faut du coup arrêter d’être romantique avec un seul business model. Il faut s’adapter, adapter chaque brand content".
Faire payer le divertissement de demain, de fait, ne semble plus impossible. "Jusqu’à présent, la réalité virtuelle, par exemple, c’était souvent des applications gratuites, indique à ce propos Timothy Young, de chez Alcatel. Mais on verra probablement des offres à la Netflix se développer." D’autres vont même plus loin, jusqu’à imaginer, comme Mehdi Sakaly, des jeux créant des mondes virtuels "où l’advertising n’aura plus de règles"…
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