En 2012, on s’appelait KIWUP et on était une agence de conseil. On voit une opportunité de marché et on décide de lancer “SimpleMail”, une solution technologique permettant aux TPE et PME n’ayant pas les ressources marketing et techniques de créer, délivrer et analyser leurs campagnes d'e-mailing de masse. Et là, soudainement, on passe d’agence conseil à startup.
Nouvelles ambitions, nouveau monde & nouveaux codes
Très vite, on séduit KIMA Ventures qui injecte 100 000 euros en capital pour nous permettre d’accélérer. On est fiers. C’est tout de même le fonds de Xavier Niel. Et on a plein d’idées pour développer KIWUP.
La première, c’est de développer un second produit. En 2013, on lance Stamplia, une marketplace de templates d’e-mails. On imagine des synergies qui doivent nous permettre de croître fortement.
C’est pourtant notre première grosse erreur. Avec deux produits à développer et à commercialiser : un SaaS (SimpleMail) et une marketplace (Stamplia) on s’éparpille beaucoup trop. On est une jeune startup (on n’est que 4 à ce moment là) et comme on dit en bon français, on doit rester “Focus”. Ce n’est pourtant pas faute de le lire dans tous les articles de conseils aux entrepreneurs. Mais quand tu vis le truc, tu te dis toujours "Moi, c'est pas pareil". Et puis on pensait rester “Focus” puisque le second produit restait sur le même marché : l'e-mail.
Néanmoins, les premiers résultats de SimpleMail sont encourageants et nous parvenons à réaliser un nouveau tour de table de 840 000 euros en 2014. KIMA nous suit. XAnge et Nestadio entrent au capital. Cette augmentation de capital doit nous permettre de recruter pour nous donner enfin les moyens de développer nos deux produits. En 6 mois, on passe de 4 à 15 personnes. Mais ça ne prend pas et nous sommes pris entre deux feux :
- La difficulté de structurer la société
Nous grandissons (trop) vite sans parvenir à créer les synergies espérées entre les deux produits.
- Le retournement du marché de l’e-mailing
L’envoi d’e-mails de masse est devenu une commodité. Le marché se consolide et tire les prix vers le bas. La valeur ne réside plus dans la délivrabilité d’un e-mail, mais dans son engagement et sa conversion. En gros, notre produit phare aux 15 000 utilisateurs, SimpleMail, va droit dans le mur.
“Pourquoi j’envoie des e-mails ?”
C’est un choc. On ne parviendra pas à se sortir de ces deux feux sans rien changer. Au fond, l’erreur fondamentale, c’est d’avoir oublié pourquoi on avait créée KIWUP. On s’est dispersé. Sans se remettre en question.
On doit donc tout revoir, à commencer par la raison d’être de KIWUP. On se pose donc la question fondamentale qui doit nous permettre de mieux adresser les besoins de nos clients.
Pourquoi envoie-t-on des e-mails ? Pour qu’ils soient reçus, certes. Pour créer de l’engagement et amener de la conversion, surtout.
Mais on assiste à un véritable changement de paradigme. Tel qu'il existe aujourd'hui, l'email marketing est mort :
- Les messages issus des campagnes de masse sont de moins en moins ouverts ;
- Et ces messages peuvent l’être plusieurs jours après leurs envois.
Résultat, les taux d’engagements et de conversions chutent. L'approche 1:1 permet elle d'atteindre des objectifs de conversion, d'engagement et d'expérience client.
Fort de ce constat, nous décidons alors de développer une technologie de personnalisation d’un e-mail en temps réel au moment de son ouverture selon de nombreux facteurs comme l’évolution des stocks, la météo, la géo-localisation du destinataire, ... On l’appelle “Live Content”.
Ce changement total et cette nouvelle vision, c’est ce que nous appelons l'ère de l'Email Intelligence.
En résumé, nous décidons de faire l’inverse de ce qui était la nature même de SimpleMail. Fini les e-mailings de masse, place à l’ultra personnalisation contextuelle des e-mails.
Début 2015, nous prenons donc deux décisions douloureuses :
- L’arrêt net de Stamplia et le licenciement de l’équipe qui travaillait dessus. On repasse de 15 salariés à 7 …. ;
- Nous décidons d’utiliser les revenus générés par SimpleMail au développement de notre technologie de personnalisation en temps réel. Cela signifie que nous arrêtons toute R&D et effort de vente sur SimpleMail. Nous décidons également de chercher un repreneur pour le produit.
Balles neuves
Après une année 2015 extrêmement difficile, on est prêt à repartir de l’avant.
- On change de nom. KIWUP devient REELEVANT et notre techno est prête. On commence à commercialiser le produit.
- On s’allège. Le canadien CakeMail rachète SimpleMail. Outre la rentrée d’argent frais non négligeable, cela nous permet de nous concentrer sur un seul produit : Reelevant, celui dans lequel nous plaçons tous nos espoirs.
A l’heure où j’écris ces lignes, nos efforts commencent à payer. Notre chiffre d’affaires mensuel connaît une croissance à deux chiffres. Et il est déjà supérieur à celui que nous générions avec SimpleMail. Notre technologie est utilisée par des grands comptes comme la MAIF, PMU, PUBLICIS ETO ou encore SFR …
La croissance est là. Et la rentabilité est proche. XAnge qui nous a toujours soutenu dans les moments fatidiques va bientôt remettre de l’argent pour accélérer le développement de notre technologie.
Bien plus qu’un pivot
On me dit souvent que l’on a fait un pivot. Mais non. On fait bien plus. Un pivot, c’est une ré-orientation stratégique basée sur des acquis. Nous, on a tout arrêté pour repartir de zéro.
- On a changé le “WHY” de notre entreprise;
- On a changé de nom;
- On a arrêté nos deux produits;
- On a revendu la techno SimpleMail;
- On est donc reparti avec un CA mensuel égal à 0 !!;
- On a changé de clientèle cible : Reelevant est conçue pour les grands comptes, là où SimpleMail s’adressait aux TPE-PME;
- On a donc dû changer la manière de vendre notre produit;
Bref, on a changé toute la culture d’entreprise de Reelevant. Et avec mes associés, on se dit souvent que c’est pour ça qu’on est en train de s’en sortir.
L’horizon s’éclaircit. On a appris de nos erreurs de jeunes entrepreneurs et nous avons un produit à haute valeur ajoutée qui est en phase avec les attentes des directions marketing. Mais nous restons vigilants 😉