Tous les jours ou presque, la rédaction de Maddyness s'attache à relayer les informations financières issues de l'écosystème des startups françaises. Des levées de fonds avec des montants plus ou moins importants, qui tournent en moyenne autour de 500 000 à 1 million d'euros. Des chiffres qui peuvent apparaître comme astronomiques pour un public non-averti, mais qui restent pourtant très utiles aux jeunes pousses prometteuses.
Vouloir lever des fonds signifie vouloir accélérer le développement de son activité. Pour aller plus vite, il est nécessaire d'avoir des moyens humains et techniques plus importants, offrant ainsi aux entreprises innovantes la possibilité de croître dans les meilleures conditions. Pour comprendre les enjeux de tels montants, la rédaction à demandé à 4 entrepreneurs de répondre à la question suivante : "Qu'est-ce que ça fait d'avoir 1 million d'euros sur son compte quand on est une startup qui vient de lever ? Quelles sont les impressions qui vous passent par la tête ?"
Alexis Jamet, CEO de Bunkr, qui a levé 1 million d'euros en mai 2014
"Quand tu récupères l'argent, finalement, tu sais déjà comment le dépenser et en combien de temps. L'objectif d'une levée de fonds, c'est justement d'aller voir des investisseurs avec un plan clair et des idées précises des secteurs de dépenses. Donc quand tout cela arrive sur ton compte en banque tu ressens l'excitation d'avoir les moyens de mener à bien toutes ces actions sur les 12-18 prochains mois ! Le plus drôle a été le rendez-vous avec le banquier qui n'a pas vraiment compris comment nous avions fait pour récupérer une telle somme..."
Igor Schlumberger, co-fondateur de VideoDesk, qui a levé 4,8 millions de dollars en janvier 2015
"Nous n’avons pas plus de 1 000 000 d’euros sur le compte, puisque les sommes annoncées comprennent tous les fonds levés depuis la création de la société. C’est une annonce pour se faire connaître sur le marché américain. Mais j’ai déjà vécu le fait d’avoir plus d’un million d’euro sur le compte de la société.
C’est un sentiment partagé entre le fait de savoir que l’on peut faire beaucoup de choses, donc le champ des possibles est élargie et on peut se concentrer sur ce qui est le plus pertinent et le plus intelligent à terme et se détacher des problèmes quotidiens.
Toutefois une société se construit jour après jour et il faut rester très focus sur chaque journée qui se passe, tout en ayant cette vision long terme et être rassuré d’avoir les moyens d’aller au bout des choses.
Parfois, on peut aussi avoir l’impression que bien travailler c’est dépenser rapidement cet argent, c’était le cas début 2000. Quand on avait de l’argent, il fallait le dépenser vite pour relever plus d’argent et beaucoup d’entreprises y ont laissé leur peau, car la créativité vient de la contrainte et que sans contrainte on est donc moins créatif".
MyFeelBack, qui a levé 1,3 million de dollars en septembre 2014
"La levée ne change pas notre vision ou notre manière de travailler, cela représente surtout plus de moyens et donc plus d'envergure ! Avant la levée, nous investissions 1 pour faire 3 de résultat. Maintenant, nous investissons 5 pour faire 20 de résultat. Notre capacité à expérimenter et prendre des risques est aussi augmentée !
Nos premières dépenses suivent le business plan validé par nos investisseurs, à savoir miser sur le développement à l'international, et recruter pour croître toujours plus vite ! En fonction de l’atterrissage à 12 mois, nous confirmons ou recalibrons l’investissement pour l’année suivante.
Sentiment de confiance aussi, car l'on sait de manière concrète que beaucoup de personnes comptent sur nous. C'est une pression positive !"
Xavier Mariani, CEO et co-fondateur d'Adikteev, qui a levé 1,1 million en octobre 2014
"C'est bien évidemment agréable de disposer de ces fonds. Cependant, ils ne doivent pas être considérés selon moi comme de l'argent de poche. Pour Adikteev, une fois passée l'émulation de lever et la satisfaction d'avoir lever, place à l'action, celle qui soutient notre croissance. Il faut donc faire les bons choix et ne pas se laisser griser par ce million. Lever c'est bien mais pas une fin en soi. C'est une nouvelle étape dans la vie de l'entreprise et de nos collaborateurs mais nous veillons à ce que tout le monde garde les pieds sur terre.
La plupart du temps, une levée de fonds intervient à un moment de la vie de la société correspondant à une vraie traction business et que les investisseurs estiment que c’est le bon moment pour accélérer. On distingue alors deux cas de figure : le premier, lorsque que la société connaît une traction régulière depuis le 1er jour. Dans ce cas, avoir 1m€ sur son compte c’est surtout avoir les moyens de ses ambitions et mettre un grand coup d’accélérateur. Le second cas, lorsque le chemin pour y parvenir a été plus chaotique et que la société a mis plus de temps à trouver son business model. La levée de fonds sera alors vécue comme une sortie d’aboutissement et donne la sensation aux fondateurs d’avoir pris les bonnes décisions business, aussi dures soient-elles.
Dans tous les cas, la levée de fonds est un exercice extrêmement chronophage et souvent difficile. Aussi, une levée de fonds réussie constitue un vraie étape structurante pour une société en croissance. Attention néanmoins : le fait que la levée soit une « étape » signifie que la ligne d’arrivée est encore loin et qu’elle ne pourra être atteinte qu’avec une exécution sans faille. Attention également à ne pas tout bruler : l’idéal est que 1€ investi puisse en rapporter 10 de chiffre d’affaires incrémental.
Chez Adikteev, cette levée nous donne les moyens de nos ambitions et nos premières décisions d'investissement se font sur le capital humain (recrutement, formation, bien être au travail) et le développement de notre technologie et offre afin de répondre à la demande croissante de nos clients. En toile de fond, elle nous permet également d'aborder sereinement notre développement à l'international."
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