Comment les contenus et outils éducatifs en ligne peuvent-ils démultiplier le potentiel des écoles quand ils sont placés du côté du professeur? A l’occasion d’un discours devenu célèbre fait à "Deegr", Tim O’Reilly (l’une des références en matière d’open source) mettait le gouvernement et l’école en perspective grâce à un nouveau postulat : "l’éducation est aujourd'hui un système ouvert".[hr]
Il expliquait ainsi que le gouvernement devrait s’inspirer de l’énorme marketplace d'Apple (l’"App Store") et ne fournir que la plate-forme et les outils fondamentaux, pour laisser à tous le soin d’en imaginer les contenus.
Appliqué à l’éducation, le modèle d’Apple permet ainsi de "passer de la simple distribution de cours (les applications, pour reprendre le modèle d’Apple) à un modèle tourné vers les professeurs (pour Apple, les développeurs) pour qu’ils créent et diffusent les meilleurs contenus et outils".
Comment pouvons nous utiliser la numérisation de ces contenus éducatifs pour étendre l’accès à une école plus efficiente (dans son contenu mais aussi dans ses outils) ? Dans quelle mesure ces outils digitaux peuvent-ils être pertinents pour les pays en voie de développement et les sensibiliser à une approche 'low-tech' ?
L’école digitale et la "longue traîne" de l’éducation
La digitalisation de contenus éducatifs remet en question les modèles plus traditionnels car ils permettent de rendre l’éducation plus facilement accessible et ce dans des zones qui en étaient parfois totalement privées. La Khan Academy, l’une des principales plate-forme en ligne, incarne ce changement et promeut les apprentissages via la coopération: le modèle de la ‘classe inversée’ est mis en avant: les enfants découvrent les cours à la maison sur des vidéos Youtube et se les approprient en classe lors d’ateliers avec leurs camarades de classe à l’école.
La connaissance ne va plus uniquement d’un professeur vers ses étudiants, mais se transmet également d’un étudiant vers un autre: les professeurs restent les points centraux de ce nouveau système "peer to peer".
Toutefois , ce nouveau modèle ne fait pas la promotion de l’auto-apprentissage, c’est au contraire un mouvement de fond qui pousse vers une éducation sur mesure en s’appuyant sur des ressources illimitées. Tout le monde peut-il dès lors devenir professeur ? Cela condamne-t-il l’école ? Naturellement, non. C’est simplement l’essor d’une nouvelle dimension de l’éducation que nous pouvons désigner comme étant “la longue traîne de l’éducation”.
Le parallèle entre commerce et éducation peut être simple. Les contenus en ligne sont à l’école ce que Chris Andersen avait conceptualisé à propos du e-commerce aux achats dans les magasins physiques. La “longue traîne de l’éducation” est un accès illimité aux cours (pour le e-commerce, les biens) sans se soucier de la taille des étagères de l’école (pour le e-commerce, le magasin) et s’applique tout aussi bien aux outils utilisés à l’école.
Les outils digitaux pour les professeurs, clés de voûte de la nouvelle école digitale ?
Avec ses 200 millions d’habitants, le Brésil est le second plus gros marché sur l’éducation après les Etats-Unis: le pays est un gigantesque laboratoire éducationnel et conduit vers de très belles innovations à grande échelle.
qMagico est résolument l’une d’entre elle et offre des outils efficaces pour tous les établissements qui voudraient digitaliser certains de leurs contenus ainsi que leurs programmes scolaires à moindre coût. Leur service s’ancre dans la philosophie de Tim O’Reilly : les cours sont en ligne et peuvent se composer en s’appuyant sur un catalogue proposé par la startup. Celui-ci intègre les souhaits des établissements, les progrès et notes des étudiants et présentent pour les professeurs un outil plus efficient pour suivre ce qui se passent dans leur salle de classe.
Déployer des écoles physique comme un réseau économiquement viable ? L’exemple de la Bridge International Academy.
Rendre duplicable l’éducation est possible avec la digitalisation des contenus et outils (le coût marginal d’un étudiant supplémentaire est alors nul). Cependant, le souci principal de toute démarche doit être les étudiants: la technologie n’est qu’un outil à son service. Un bel exemple qui met cela en exergue: celui de la Bridge International Academy.
Bridge Academy coûte 5 dollars par mois. Cela semble peu mais au Kenya, où l’institution a démarré, c’est un réel investissement qui traduit le changement induit. Présenté comme le "Starbucks de l’éducation", Bridge a déjà ouvert plus de 200 écoles dans le pays ces dernières années et éduque chaque jour plus de 50 000 enfants. En classe, vous ne trouverez que peu de technologie: les enfants n’en ont pas les moyens.
L'approche low-cost est du côté du professeur: les programmes pédagogiques sont pensés et numérisés en amont puis proposés directement aux professeurs sur tablette (à faible coût).
Les étudiants sont alors accompagnés individuellement en cas de blocage et leurs professeurs ont accès à des exercices pour chacun de ces derniers.[hr]
L'école devient alors une double plate-forme: du point de vue du contenu avec un programme harmonisé et des outils adaptés (à la Tim O’Reilly) mais aussi du point de vue du contenant (avec une structure et une organisation à faible coût).
Enfin une approche pertinente économiquement et viable?
Article proposé par Margaux Pelen, curieuse des projets éducatifs utilisant de la technologie à bas coût à travers le monde et à l’origine du futur projet Local Academy
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