Le management juridique a pour objectif de protéger et de valoriser le patrimoine immatériel de votre startup. Il prend tout son sens pour les entreprises innovantes. En matière de propriété intellectuelle, il conditionne la titularité des droits et doit intervenir avant même la création de la structure, puis tout au long de la vie sociétale (développement, financement, perspective de vente etc.).[hr]
Comme expliqué dans la précédente rubrique, il existe diverses méthodes de protection de vos actifs (brevet, marque, dessin et modèle : dépôts INPI ; noms de domaine : réservation auprès des organismes certifiés privés, etc.). Mais l’innovation doit également se protéger en amont et en interne (au sein des entreprises).
1- La protection juridique en amont de l’innovation
Il n’y a qu’à citer l’exemple désormais célèbre de Coca Cola pour comprendre que le meilleur moyen de se protéger est le secret. Toute la question sera alors de déterminer le bon moment pour divulguer. Cette décision stratégique n’est pas une mince affaire.
En effet, vous devrez concilier entre :
- prendre le risque de déposer trop tôt et perdre en temps de protection – cela est particulièrement vrai pour les brevets, compte tenu de la longueur des procédures de publication, voire d’extension à l’international, et de la durée de validité du titre (20 ans) ; et
- déposer trop tard car la règle en droit français est que la titularité des droits appartient au premier déposant (ce qui n’est pas le cas partout ailleurs. Notamment, aux Etats Unis, l’invention appartient à l'inventeur)
Dans ce cadre, vous devrez, pour vous prévaloir de vos droits, apporter la preuve de votre antériorité. Pour vous assurer un moyen de preuve de création, plus particulièrement s’agissant des droits de propriété littéraire et artistique (dont le logiciel, pour tout ce qui n’est pas protégeable par brevet), vous pouvez avoir recours à:
- l’enveloppe "Soleau" (coût 15 €, dépôt auprès de l’INPI : Voir la page dédiée),
- à un dépôt des actifs et informations liées auprès d’un notaire ou d’un huissier,
- le cas échéant, à un dépôt auprès des sociétés d’auteur/gestion collective de droits (type SACEM).
Pour chaque actif, vous devrez donc procéder à une étude approfondie avant de prendre la décision de communiquer ou de maintenir la confidentialité. Cette décision sera prise au cas par cas, au regard des droits des tiers et des risques éventuels en termes d’antériorité.
2- La protection juridique en interne
Celle-ci vise votre organisation vis-à-vis des tiers et de vos salariés.
Vous organiser vis-à-vis des tiers (prospects, clients, partenaires, etc.)
L’encadrement juridique de la valorisation de l’innovation passe ici par la conclusion d’accords de confidentialité mais aussi plus largement, par la politique contractuelle.
A- Les accords de secret / de confidentialité
En anglais, "CDA" (confidential disclosure agreement) ou "NDA" (non disclosure agreement).
Dans le cadre d’un tel accord, les parties s’engagent à ne pas divulguer, ni exploiter les informations définies comme "confidentielles" pendant une durée déterminée.
L’accord de confidentialité s’utilise notamment dans les cas suivants :
- avant d’amorcer une collaboration, dès les premiers contacts avec un partenaire, pour les négociations techniques, scientifiques ou commerciales,
- au cours d’une collaboration, pour encadrer plus particulièrement un point spécifique ou pour la mise en place de nouvelles négociations,
- en dehors de toute collaboration : échanges de données, visite des locaux par un tiers, accueil de chercheurs étrangers ou d’étudiants : attention, les dispositions des conventions de stage sont souvent
Cet accord devra être équilibré pour les deux parties, protéger les acquis et le savoir-faire de chacun.
Veillez ainsi à la définition des informations confidentielles, qui seront seules protégées, à la durée de l’accord et la survivance des obligations de confidentialité et de non usage, aux parties signataires et à vous limiter à l'obligation de confidentialité.
ATTENTION !!!
L’accord de confidentialité est indépendant de la collaboration. L’établissement de l’accord de confidentialité ne signifie pas que les négociations aboutiront et ne doit pas anticiper d’autres modalités (par exemple la propriété d’éventuels résultats ou les modalités d’exploitation). Des contrats adaptés devront régler au cas par cas la mise en place des relations.
B- La politique contractuelle
La politique contractuelle relative à l'innovation passe par la conclusion d'accords de partenariat ou de coopération, de contrats commerciaux et de licences d'utilisation, ainsi que par des partenariats public-privé pour le développement et l'exploitation d'innovations issues de la recherche publique.
Les contrats, quelle que soit leur nature, doivent respecter des exigences de fond et de forme, en termes réglementaire, financier et juridique.
Toutes les formes d’exploitation sont envisageables, dès lors que ces droits ont été formalisés par un dépôt de brevet, ou une forme ad hoc de protection intellectuelle (concession de licence, ou, mais beaucoup plus rare, cession de brevet, collaboration de recherche ou par la création d’une entreprise innovante).
La négociation et la mise en place de tels contrats peuvent très vite se révéler d’une grande complexité. Portez une attention toute particulière, dans le cadre de la rédaction de ces contrats, au respect du secret et de la confidentialité, ainsi qu’à la propriété des résultats.
Vous organiser vis-à-vis des salariés
- l’insertion dans les contrats de travail de clauses dédiées à la propriété intellectuelle, en cas d’activité inventive (même potentielle)
Dans ce cadre, vous devrez notamment prendre en compte les cessions de droits de propriété des salariés, la non-concurrence et la confidentialité.
Attention également de ne pas oublier d'inclure ces mêmes clauses dans les contrats avec les sous-traitants et
- le régime spécifique des inventions de salariés.
Que nous aborderons dans le cadre de la prochaine rubrique, au regard de sa spécificité.
Crédit Photo: Flickr - Louis K