Nous avions déjà eu le plaisir de vous la présenter ici, voici le second volet de l'interview et des conseils prodigués par Anne de Forsan. Les relations presse sont le nerf de la guerre, probablement un des moins coûteux et un des plus efficaces autant pour assurer la visibilité de son entreprise qu'assoir une stratégie de communication à plus long terme. On comprend l'importance de bonnes pratiques dans ce milieu et vous laisse les découvrir :
#1 Entrons dans le vif du sujet. On va parler des règles de base pour réussir ses relations presse. Commençons par les premiers réflexes à avoir aux débuts de l’entreprise, je pense évidemment au dossier de presse, la création d'un espace presse sur son site, prospecter et networker, etc. Comment préparer l’aventure en amont ?
Préparation est le maître-mot !
Une bonne nouvelle pour commencer : à l’heure du (quasi) tout numérique, je ne vois plus l’intérêt du dossier de presse ! Historiquement, le « DP » était la fiche signalétique de l’entreprise où étaient consignés tous les éléments clés : chiffres, technologies, produits, marché, bio des dirigeants, contact etc. Aujourd’hui TOUS ces éléments sont disponibles (ou doivent absolument l’être)… en ligne.
Ergo : exit le dossier de presse
Ergo (bis) : bien penser à créer un espace presse sur son site.
Ensuite, et j’ai commencé à l’évoquer plus haut, les RP demandent de la régularité. La première des choses à faire est donc de réfléchir à ce que l’on va dire et à la fréquence des annonces. Une notoriété ne se crée pas sur une seule annonce, il faut donc en planifier plusieurs et les diffuser à intervalle régulier. C’est un exercice qui semble un peu compliqué pour une startup qui consacre l’intégralité de ses ressources à la sortie de SON produit et n’a pas une « roadmap » très fournie.
Le secret, c’est qu’une annonce ne relève pas uniquement du produit « fini ». Un lancement en beta programme peut faire une très belle annonce, des partenariats technologiques ou la signature d’un nouveau client, le recrutement d’un expert reconnu, une levée de fonds ou encore un commentaire sur un événement de son marché (rachat d’un concurrent, nouvelle législation etc.) sont autant de thèmes qui peuvent être développés dans une annonce.
Diffuser une annonce toutes les 4 à 6 semaines est le rythme à atteindre.
Deuxième travail essentiel à réaliser : identifier les acteurs majeurs de son marché et les mots-clés qu’ils emploient. Deux raisons à cela : premièrement les journalistes ne vous croiront pas quand vous décrèterez ne pas avoir de concurrents, car s’il n’y a pas de concurrents, il n’y a pas de marché et donc pas de raison, pour eux, de parler de vous ! La seconde raison est un corollaire : vous avez besoin que le journaliste auquel vous vous adressez identifie immédiatement votre marché ; pour ça, il faut que vous employiez les termes consacrés dudit marché. Il est assez simple de trouver ces termes en cherchant sur le site des concurrents, dans les articles et rubriques des médias, sur Twitter, etc.
Il est essentiel d’utiliser le même champ sémantique que les autres acteurs d’un marché pour simplement … y exister.
Enfin le « réseautage » est très important. L’écosystème des startups est de plus en plus dynamique et nombres d’événements sont organisés toutes les semaines. Je pense qu’il est important de s’y rendre régulièrement pour identifier ses pairs, être identifié et pour rencontrer les journalistes qui y assistent. Etablir une relation « de vive voix » avec eux permet de mieux comprendre leurs attentes et de favoriser leur écoute quand les premières annonces seront diffusées. Il existe un grand nombre de newsletter qui listent ces événements et auxquelles je recommande chaudement de s’inscrire et notamment : http://startupdigest.com/paris/ ou encore http://agendao.fr/.
#2 Et quand l’entreprise naît, quelles stratégies adopter ? Tu pourrais nous donner quelques conseils généraux ?
La stratégie va dépendre des objectifs que la startup se fixe.
On peut identifier 5 grands types d’objectifs :
- « Je veux être reconnu pour le Gourou que je suis »
- « Je veux lever des Fonds »
- « Je veux vendre »
- « Je veux créer du trafic vers mon site »
- « Je veux recruter »
Il est essentiel pour le succès des relations presse et donc de l’entreprise de définir très clairement ses objectifs. Chacun de ces objectifs peut être légitimes, l’essentiel est qu’il corresponde réellement à ce que l’entreprise veut réaliser.
Une fois fixé, l’objectif appelle naturellement une catégorie de médias spécifiques qui vont devenir la cible exclusive de vos relations presse.
En d’autre termes :
- « Je suis un gourou » appelle les média grand public, les magazines à forte visibilité, les TV et les radios
- « Je veux lever des fonds » appelle les médias business (Les Echos, la Tribune, etc)
- « Je veux vendre » appelle les médias spécifiquement lus par les clients potentiels
- « Je veux créer du trafic vers mon site » appelle tous les médias en ligne
- « Je veux recruter » appelle des médias très verticaux (action commerciale, developpez.com, etc) et/ou régionaux (Ouest France, la Provence, etc.)
Bref, mon conseil principal ici est de concentrer ses efforts pour atteindre un objectif à la fois. Les relations presse nécessitent beaucoup d’énergie, les startups n’ont pas suffisamment de ressources pour « couvrir» tout le spectre de la presse, il faut donc favoriser l’efficacité.
#3 Comment réussir une interview ?
L’interview est un moment important dans une campagne de Relations Presse parce que c’est le moyen d’aller au-delà du message que l’on a présenté dans son communiqué.
Encore une fois, rien de sorcier, mais avant tout préparez-vous !
Le point principal de la préparation, c’est de déterminer AVANT le face-à-face, ce qui serait, pour vous, le titre idéal de l’article que le journaliste va rédiger. Si vous ne faites pas cet exercice, le résultat est plus qu’incertain…
Ensuite, et cela semble logique, il est important d’éviter tout jargon et donc corollairement, de reformuler vos déclarations si vous sentez que votre message ne passe pas. Bref d’être attentif à votre interlocuteur. Il n’est pas là pour vous « piéger », mais pour récolter suffisamment d’information pour pouvoir rédiger un article intéressant.
Enfin, et ça m’est régulièrement confirmé par nombre de journalistes, n’hésitez pas à utiliser le « Off » : cela vous permet de donner de la perspective à discussion, d’établir une véritable relation avec le journaliste et enfin, c’est un moyen malin de le recontacter lorsque l’information est enfin officielle. Aucun journaliste ne publiera une information qui lui a été communiquée en « off ». C’est typiquement très utile pour indiquer à quel moment un produit sera disponible, un contrat important sera signé etc.
#4 Ce qui découle de la question précédente : comment gérer les retombées presse, qu’elles soient négatives ou positives d’ailleurs ?
L’objet d’une retombée presse est bien que vos clients potentiels la lise. Aujourd’hui, grâce notamment aux réseaux sociaux, il est possible de démultiplier la diffusion d’un article en le reposant sur Facebook, LinkedIn ou encore Twitter. Ne vous privez surtout pas de le faire !
Les articles franchement négatifs sur une startup sont assez rares : les journalistes ont peu de temps et beaucoup à couvrir, donc ils préfèrent souvent ne pas écrire sur une entreprise qu’écrire de façon négative. Toutefois des critiques négatives peuvent arriver, particulièrement dans les commentaires adossés aux articles en ligne et dans les forums.
Une fois que vous avez repéré une critique, évaluez-là :
- quand elle est le fait d’un journaliste qui n’a pas eu les bonnes informations, il est possible de le recontacter et de demander un addendum voire un nouvel article sur la bonne version produit etc.
- quand elle est le fait d’un journaliste qui n’a simplement pas aimé votre produit, il n’y a pas grand chose à faire, sinon lui proposer de vous donner son avis pour la prochaine itération. Vous avez ainsi une chance que son écho soit plus favorable lors de votre prochaine annonce.
- quand elle est le fait d’un utilisateur, il faut tenter de se mettre à sa place pour comprendre en quoi un produit qui lui donnait satisfaction jusqu’à présent a pu le décevoir. On passe là dans une phase de gestion de la base client et souvent, reconnaître qu’une montée de version a été précipitée ou que le changement d’interface n’a pas été suffisamment testé. Vos clients sont vos meilleurs ambassadeurs : écoutez-les.
- Enfin, quand elle est le fait d’un « troll», c’est à dire d’une personne inconnue qui critique très négativement le produit, vous avez peu d’option, sinon de proposer une réponse neutre au commentaire, puis de laisser la « vague » passer : bien souvent les autres utilisateurs / commentateurs répondent aux trolls aussi énergiquement que vous le souhaiteriez… sans impliquer votre équipe.
#5 Un dernier conseil ?
Cela semble logique quand les relations presse sont gérées en interne, et c’est d’autant plus important quand vous confiez ce projet en externe : passez du temps avec la ou les personnes qui vont réaliser vos RP et faites-le régulièrement !
Pour des RP efficaces, la connaissance de la vie de son client, de son marché, de ses tendances et acteurs sont essentielles pour pouvoir défendre une annonce ou une innovation. Probablement plus que de maîtriser l’art de la rédaction d’un communiqué de presse.